Les professeures Carla Barrosa da Costa et Nathalie Loye ainsi que leurs étudiants au doctorat du département de sciences de l’éducation de l’UQAM ont sondé des enseignants pour mieux comprendre leurs états affectif et émotionnel au cours de la dernière année. Voici quelques éléments de leurs conclusions.
Au Québec, 352 enseignants francophones de tous les niveaux, de la maternelle à l’université, et engagés dans des activités d’enseignement durant la pandémie, ont rempli un questionnaire en ligne entre septembre et novembre 2020. De ce total, 63 enseignants du préscolaire, du primaire et du secondaire ont composé l’échantillon de la recherche. Pratiquement la totalité (97 %) vivait une formule d’enseignement en mode présentiel ou hybride.
De façon globale, les résultats montrent un scénario professionnel inquiétant : la passion d’enseigner se manifeste [dans les réponses des enseignants], mais elle est toujours suivie d’expressions de découragement liées à des frustrations constantes et intenses.
Les chercheurs font donc le constat que le soutien aux enseignants devrait devenir « un élément clé pour les aider à enlever l’épée de Damoclès au-dessus de leur tête ». Les guider à trouver des solutions concrètes et collectives pour diminuer leur sentiment d’isolement et d’insécurité face aux règles sanitaires est une action urgente, possible et souhaitable.
Les guider à trouver des solutions concrètes et collectives pour diminuer leur sentiment d’isolement et d’insécurité face aux règles sanitaires est une action urgente, possible et souhaitable.
Quand la santé psychologique mérite attention
Plus concrètement, les premiers résultats de la recherche font ressortir des préoccupations ou des signes d’angoisse et de détresse face à l’exercice de la profession durant la pandémie, quel que soit l’ordre d’enseignement.
Toutefois, la situation est plus délicate chez les enseignants du préscolaire, du primaire et du secondaire qui sont plus anxieux et susceptibles de vivre un épuisement professionnel que chez leurs collègues du postsecondaire.
Pour 86 % de ces enseignants, des sentiments de souffrance ou de malaise dans l’exercice du travail et des sentiments d’abandon et d’impuissance sont perçus à différents niveaux d’intensité (de rarement à presque toujours).
Chez 30 des 63 enseignants, ces sentiments sont présents au moins la moitié de leur temps d’enseignement et parmi eux, 19 (63 %) ont exposé, en mots, leur angoisse, leur inconfort ou leur sentiment de détresse.
L’analyse des commentaires dégage trois aspects associés à l’épuisement professionnel chez les enseignants :
1. L’adaptation aux consignes sanitaires
Les expositions fréquentes aux interactions humaines dans le travail enseignant durant la pandémie ont fait ressortir une dissonance perçue entre les normes sanitaires annoncées et la réalité du milieu scolaire.
2. Le sentiment d’abandon
Les enseignants se sentent laissés à eux-mêmes, sans soutien. Ce sentiment négatif est notamment attribué au manque de reconnaissance de la profession par la société en générale et à la pénurie de ressources humaines et de matériaux, aggravée par la Covid-19.
3- La lourdeur du travail
Les enseignants se sentent submergés par la charge de travail qui, selon eux, a augmenté considérablement pendant la pandémie.
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation le 23 mars 2021. L’École branchée vous en présente un résumé avec l’accord de l’auteure, Carla Barrosa da Costa.