Des étudiants de deuxième année au Baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement au primaire à l’Université de Montréal, dans le cadre de leur cours Intégration des TIC 1, proposent un profil de sortie de la compétence numérique d’un élève après son passage à l’éducation préscolaire.
Par Audrey Raynault, B.Ed., M.Éd., Ph.D.
Au postdoctorat pour le Réseau Périscope à l’Université Laval et chargée de cours à l’Université de Montréal. Ancienne enseignante et conseillère pédagogique.
et Andréanne Coursol, Valérie D’Amours, Guylaine Lalonde, Catherine Legault, Marcel-Nicolas Murillo
Étudiants de deuxième année au Baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement au primaire à l’Université de Montréal
Les 2 et 3 octobre 2019 avait lieu l’événement Courants numériques et vents québécois : les utilisations du numérique en éducation. Cet événement du Centre de transfert pour la réussite éducation au Québec (CTREQ), organisé en collaboration avec le Réseau PÉRISCOPE et avec le soutien du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, a permis à divers acteurs de réfléchir à l’usage du numérique dans le milieu scolaire québécois.
Dans l’un des groupes de discussion, le fait qu’à ce jour, pour tous les ordres d’enseignement, aucun profil de sortie n’est proposé dans le Cadre de référence de la compétence numérique en éducation (MEES, 2019) a été abordé. Un profil de sortie décrit les caractéristiques que l’apprenant développe à l’issue de sa formation. Il intègre les compétences et connaissances à développer en plus des valeurs et des attitudes à promouvoir (Prégent, Bernard, Kozanitis, 2009). Or, les participants étaient curieux de connaître la perception à ce sujet de la part des étudiants qui suivent les cours universitaires d’intégration des technologies en éducation. En effet, la cohorte d’automne 2019 représente le premier contingent d’étudiants universitaires à intégrer le contenu du Cadre de référence de la compétence numérique (MEES, 2019) dans leurs activités d’enseignement liées à ce cours.
C’est ainsi qu’après avoir fait leur premier cours d’intégration des technologies en éducation dédié à l’éducation préscolaire, des étudiants de deuxième année du Baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement au primaire de l’Université de Montréal ont amorcé une réflexion autour d’un profil de sortie de compétence numérique des élèves après leur passage à la maternelle 5 ans.
La démarche
À l’automne 2019, des étudiants de deuxième année au Baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement au primaire à l’Université de Montréal, dans le cadre de leur cours Intégration des TIC 1 (PPA2111), ont réfléchi afin de proposer un « profil de sortie » de la compétence numérique d’un élève de 5-6 ans après son passage à l’éducation préscolaire 5 ans. À la suite de ce cours, ils croient qu’un usage réfléchi des technologies dès la maternelle s’avère être une pratique soucieuse des élèves pour les outiller à faire face aux enjeux de la quatrième révolution industrielle, celle du numérique.
Ils ont d’abord partagé leurs premières idées, de manière individuelle, en publiant sur divers médias sociaux afin d’amener le public à réagir à leurs propositions. Ils ont utilisé ce qu’on appelle une démarche de coélaboration de connaissances (knowledge building) pour cet exercice. À la lumière de leurs réflexions communes et des rétroactions du public à l’égard de celles-ci, ils ont proposé un profil de sortie.
Basé sur les deux premières et principales dimensions du Cadre de référence de la compétence numérique (MEES, 2019), à savoir Agir en citoyen éthique à l’ère du numérique et développer et Mobiliser ses habiletés technologiques, ils estiment que ce profil de sortie pour les élèves de maternelle pourrait cibler particulièrement les deux dimensions suivantes : Innover et faire preuve de créativité avec le numérique et Collaborer à l’aide du numérique.
Par ailleurs, ils ont écarté de leurs propositions l’idée de cibler la dimension Développer sa pensée critique à l’égard du numérique comme toile de fond d’un profil de sortie. En effet, plusieurs professionnels issus du secteur de l’éducation préscolaire leur ont plutôt conseillé de faire de la prévention liée à un usage sain du numérique et de renforcer les activités qui amènent les élèves à créer leur identité et personnalité, une compétence du programme.
Proposition de profil de sortie
En mobilisant une ou des compétences (6) du Programme de formation à l’école québécoise de l’éducation préscolaire (PFÉQ), ils proposent un profil de sortie de la compétence numérique d’un élève de six ans après son passage dans une classe d’éducation préscolaire 5 ans. Il se décline en deux éléments :
1- L’élève aura amorcé le développement de ses habiletés technologiques avec les outils numériques qui lui permettent de cocréer ou de créer pendant la démarche d’apprentissage. Utilisées ainsi, on peut présumer que ces différentes technologies peuvent favoriser chez les élèves de l’éducation préscolaire des occasions d’apprentissage dans lesquelles ils seront actifs.
2- L’élève aura été initié à l’usage sain des technologies et du numérique dès son passage à la maternelle par un apprentissage de la gestion du temps d’écran dans des contextes variés dans lesquels le numérique s’avère être un levier pour apprendre, pour ainsi maximiser les opportunités d’usages actifs et minimiser ceux de consommation passive (Romero, 2015).
Ainsi, ils estiment que l’enfant pourrait développer plusieurs habiletés de communication et des stratégies d’organisation de sa pensée avec des applications éducatives et ludiques qui permettent la création et la collaboration. Par exemple, ils croient qu’en les initiant à la programmation, à la robotique et à certaines applications ou logiciels leur permettant de raconter et de créer, notamment des histoires, les enfants développeront, certes les six compétences du PFÉQ en éducation préscolaire, mais aussi des habiletés reliées aux fonctions exécutives (activation, inhibition de l’impulsivité, flexibilité cognitive, planification et organisation, mémoire de travail, régulation émotionnelle).
Une proposition complémentaire au Continuum de développement annoncé récemment
Dévoilé en janvier 2020, le Continuum de développement de la compétence numérique (MEES, 2020) « vise à préciser la portée des éléments des douze dimensions de la compétence numérique et à les situer sur une matrice de progression en trois niveaux : débutant, intermédiaire et avancé (…) », il « contribue à l’opérationnalisation du Cadre de référence de la compétence numérique en spécifiant des comportements, des situations ou des contextes précis » (MEES, 2020, p.5). À ce sujet, les niveaux de progression des dimensions du Continuum, même celui dit débutant, semblent parfois plus ou moins adaptés et imprécis pour l’éducation préscolaire.
En effet, les étudiants et leur chargée de cours croient que toutes les dimensions du Cadre sont pertinentes à l’éducation préscolaire, mais ils ont tenté par cet exercice de sélectionner de manière plus spécifique les dimensions de la compétence numérique pour un profil de sortie adapté à cet ordre d’enseignement. « Notre proposition nous apparaît complémentaire au Continuum (MEES, 2020) lancé récemment », explique Audrey Raynault. « Par ce premier exercice, nous souhaitons soulever une réflexion sur les profils de sortie ou des attentes de fin de cycle de la compétence numérique pour tous les ordres d’enseignement afin de favoriser sa planification judicieuse et son intégration interdisciplinaire de l’éducation préscolaire à l’université. »
Références
Prégent, R., Bernard, H. et Kozanitis, A. (2009). Enseigner à l’université dans une approche-programme : guide à l’intention des nouveaux professeurs et chargés de cours. Presses inter Polytechnique.
Romero, M. (2015). Usages pédagogiques des TIC: de la consommation à la cocréation participative. Repéré à https://www.vteducation.org/fr/articles/collaboration-avec-les-technologies/usages-pedagogiques-des-tic-de-la-consommation-a-la