Pour relire la partie 1 : un printemps pas comme les autres et la partie 2 : arriver à Noël sur les genoux
On ne sait pas encore tout à fait ce que nous réserve 2021, mais je ne m’attends pas à ce que les choses reviennent à la normale dans les prochains mois. D’ailleurs, ce retour à la normale tant espéré, est-il souhaitable? Veut-on vraiment y revenir après ce que nous avons vécu? Il me semble que collectivement, nous en sommes venus à plusieurs constats :
- L’éducation est un service essentiel.
- Les parents reconnaissent plus que jamais la complexité de l’acte d’enseigner.
- Ils apprécient l’importance de l’école et reconnaissent le travail fait, notamment sur le plan de l’implantation des mesures sanitaires.
- Les TICE peuvent cimenter les relations sociales plutôt que les miner.
- La bienveillance et le développement des compétences dites « humaines » est plus important que ce qui peut figurer au programme.
- Etc.
La normale en éducation nous a exposé toute notre fragilité. La pandémie a révélé (comme si nous ne le savions pas déjà!) l’état vétuste de plusieurs écoles, des questionnements sur la qualité de l’air, sur la grandeur des classes, sur la quantité des effectifs enseignants, sur le transport scolaire, etc. Voulons-nous vraiment revenir à la normale, alors que nous sommes témoins de ce qui est inacceptable? En répondant oui à cette question, nous passons de témoins à complices. Il faut refuser un éventuel retour à la normale et réinventer l’école et toutes ses facettes, allant du service de garde à l’architecture des écoles, du transport scolaire à la formation des maîtres. Tout doit être revu et des activités de consultation menant à une réforme doivent être mises en place rapidement.
Il faut aussi regarnir nos facultés d’éducation et rendre la profession enseignante attrayante malgré tout. L’enseignement, c’est la création des possibles, c’est une façon de contribuer directement à la société et à la culture. Or, il faut absolument que l’éducation devienne LA priorité gouvernementale et que les investissements soient faits pour rénover nos écoles et en bâtir de nouvelles à la fine pointe de l’humanité. Ces écoles doivent contenir tous les outils nécessaires pour que les enseignants puissent mener de front la tâche qui leur est confiée et que les élèves puissent s’y sentir bien. Des écoles en cohérence avec les impératifs sociaux du 21e siècle et non ceux issus du Rapport Parent.
C’est une profession qui peut être ingrate par moment, comme toute profession des services publics essentiels, soit les infirmières, les médecins, les policiers, etc. Même sans pandémie, enseigner est une mission complexe, car c’est d’offrir à l’élève ce que souvent, il ne réalise pas avoir besoin.
Pour ceux qui revendiquent que le vaccin soit offert prioritairement au personnel scolaire, sachez que je suis en désaccord. Je ne me précipiterai pas pour me faire vacciner et j’attendrai patiemment mon tour. Le vaccin doit être offert d’urgence à ceux qui sont fragilisés par le virus, principalement les personnes âgées. Également à ceux qui travaillent directement auprès des personnes infectées dans les hôpitaux et centres d’hébergement et de soins de longue durée.
Les choses seront encore instables pour quelques mois. Je travaille à accepter cette instabilité et la transformer en opportunités pour mes élèves et pour moi-même. La situation aura eu cela de bien : nos jeunes apprennent à tolérer l’ambiguïté et nous, professionnels de l’éducation, devons saisir les opportunités pour nous redéfinir professionnellement : « le monde n’est incertain que pour ceux qui ont besoin de certitudes. Pour les autres, il n’est que le monde de toujours avec les risques et les chances de ses hasards ». (Sérieyx, 2003)