Plusieurs enseignant(e)s ont vécu la fin de l’année scolaire comme étant des mois de redécouverte de leur profession. Plusieurs vont profiter de l’été pour se ressourcer, mais aussi, pour mieux s’approprier les technologies éducatives et ainsi mieux les intégrer à leurs activités pédagogiques dès la rentrée. Certains, pour ne plus se faire prendre par une éventuelle nouvelle fermeture, d’autres parce qu’ils y ont vu des avantages! Notre collaborateur Marc-André Girard partage ses réflexions à ce sujet.
Plusieurs enseignants m’ont confié vouloir prendre l’été pour se ressourcer, mais aussi, pour mieux s’approprier les technologies éducatives et ainsi mieux les intégrer à leurs activités pédagogiques. L’idée, selon eux, est double. Premièrement, pour certains, il s’agit de ne pas se faire prendre une seconde fois si jamais un nouveau confinement devait survenir au courant des prochains mois. Pour d’autres, c’est le fait d’avoir goûté au fruit techno imposé pendant les trois derniers mois de l’année scolaire qui leur a fait découvrir que, finalement, ils ont aimé l’expérience tout comme les défis posés par la situation. Oui, plusieurs enseignants ont vécu les derniers mois de l’année scolaire comme étant des mois de redécouverte de leur profession! Quelle joie d’entendre cela et, mieux, de constater cela sur le terrain (en tant que directeur d’école) ou à la maison (en tant que papa)!
Retour en arrière
À propos, voici une petite confidence : quand j’étais jeune, je jouais de la batterie. Rien de bien spectaculaire, mais avec mon groupe de musique d’ados(!), je pouvais donner le rythme pour jouer quelques succès des années 1990 en jouant « à l’oreille ». J’étais correct, sans plus. Lorsqu’est venu le temps de passer aux choses sérieuses, je me suis mis à tenter d’apprendre de mes batteurs préférés. Je les regardais jouer avec une telle aisance des parties assez techniques et difficiles. Ça a eu l’effet contraire de ce que j’aurais souhaité : ça m’a découragé. Après un temps, j’ai vendu la batterie et c’en était fait. J’ai abandonné. De toutes façons, j’étais rendu au cégep et j’en avais trop dans mon assiette pour me concentrer sur ce dossier.
Or, c’était la première fois que j’étais confronté au fait que le simple talent ne suffit pas pour dépasser ses limites et accomplir de grandes choses. La zone de confort est certes… confortable, mais, au fond, il faut savoir la quitter au bon moment pour évoluer. Cela est vrai personnellement, et tout autant professionnellement! Il faut travailler et s’investir à fond. Mes batteurs préférés le faisaient, eux, et ils y gagnaient leur vie. Pas moi. Ce n’était pas un plan de carrière. J’avais d’autres choses en tête à ce moment. Ne vous en faites pas, vous n’avez pas manqué grand-chose!
En parallèle, j’avais une idole : Michael Jordan. Je me souviens d’une entrevue qu’il avait accordée à un journaliste sportif qui lui avait rappelé à quel point il ne manquait que très rarement ses lancers, surtout ceux qui étaient décisifs. Jordan riait de bon cœur. Incrédule, le journaliste se demandait bien ce qu’il y avait de si drôle. Dans un élan de sagesse, l’athlète a répondu en toute franchise que tout ce que le monde voit à la télé ou dans l’amphithéâtre, c’est toujours l’athlète à son meilleur. Le public ne voit pas tous les sacrifices qu’il a faits, le temps qu’il a investi à se pratiquer, ni tous les lancers manqués dans sa carrière. Il avait même dit que s’il réussit autant ses lancers, c’est parce qu’il en a manqués encore plus!
Cela m’a toujours fait réfléchir. Pour réussir, il faut se pratiquer et répéter certaines tâches. Pour répéter ses tâches, il faut les initier et, pour les initier, il faut sortir de sa zone de confort. Pour réussir le plus de lancers possibles, il faut lancer souvent. Pour devenir compétent à quelque chose, il faut le mettre en pratique tout aussi souvent.
Pour ceux qui sont tombés dedans étant petits…
Vous avez souvent entendu : « Toi, t’es bon avec les technologies. Pas moi. » Cela m’a toujours fait sourciller. Être bon dans les technos, c’est inné ou acquis? On nait avec la bosse des technos? Non. On devient bon avec les technos. Et, en passant, que ce soit clair : j’ai une connaissance très superficielle des technologies. Je suis un pédagogue, devenu ce que la force des choses désigne désormais comme étant un « technopédagogue ». Au-delà du terme, de ses subtilités et des controverses qu’il soulève, un fait demeure : on devient technocompétent en s’exerçant. Pourtant, il n’est pas question de déployer les technologies de mur à mur, sans discernement pédagogique. Non! Au contraire, il faut exercer son jugement professionnel et déterminer quel est le meilleur outil didactique ou quelle est la meilleure approche pédagogique à employer avec ses élèves au bon moment, dans le bon contexte.
Il faut donc se questionner sur ses propres choix professionnels en pédagogie en prenant soin d’accepter toutes les réponses qui résulteront de ce questionnement, incluant celles ouvrant le champ des possibles technologiques. Cette étape est cruciale : le premier pas est toujours le plus difficile.
Ce qui est à comprendre est simple : il faut se lancer hors de sa zone de confort et de contrôle pour réussir. Et on ne réussit pas du premier coup, enfin, pas toujours, mais en persévérant, tous peuvent devenir des « pros de la techno »! Ne soyons pas dupe : il y a plusieurs autres conditions de réussite de l’intégration des technologies à la pédagogie qui complètent la question du courage que l’enseignant peut avoir à se lancer. À titre d’exemple, il y a la disponibilité des ressources financières et matérielles, la disponibilité du soutien technique, le mentorat professionnel, etc.
L’échec : une condition sine qua non à la réussite, et pas que pour les élèves!
Comme Michael Jordan, on a tous échoué. L’échec est une condition sine qua non à la réussite. En tant qu’enseignant, nous le savons lorsqu’il est question de la réussite des élèves, mais rappelons-nous que la même règle s’applique aussi à nous. Se « planter » devant une classe… quel enseignant n’a jamais vécu cela? Bref, nous sommes tous passés par là. Pensez à votre enseignant-modèle, lequel est à l’aise avec les technos. Il s’est déjà planté là ou ailleurs dans sa pratique. Pourtant, vous le respectez quand même et même, vous l’admirez! Cela peut être la même chose pour vous.
On a tous vécu ce sentiment de vulnérabilité professionnelle désagréable. C’est ce sentiment qui nous force à sortir de cet inconfort pour ainsi devenir une meilleure version de soi-même. Pour certains, c’est ce qu’on appelle la mentalité de croissance et, pour d’autres, c’est le mode « bêta perpétuel » (expression popularisée par Jacques Cool), celui qui fait de notre identité professionnelle une version toujours améliorable, perfectible. Celle où nous sommes ouverts à nous renouveler et à repousser nos limites.
Nos craintes, traduisant souvent notre manque de confiance professionnelle, sont certainement le pire ennemi du progrès : celui des élèves, le nôtre, mais aussi celui de notre profession.
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