ANNONCE

Démystifier l’intelligence artificielle en éducation

Les abonnés au magazine ont accès à du contenu exclusif!

Vous êtes abonné(e) au magazine en version numérique?

ABONNEZ-VOUS ICI! 
💡 D'autres grands dossiers tels que celui-ci sont offerts aux abonnés du magazine École branchée. Découvrez l’abonnement institutionnel, qui permet d’offrir l’accès à tout le personnel d’une école (ou plus!) à tarif très avantageux. N'hésitez pas non plus à nous contacter à info@ecolebranchee.com pour obtenir une présentation de nos différentes offres d'abonnements pour les écoles!

Par Martine Rioux
Avec la précieuse collaboration d’Alexandra Coutlée et de Keivan Farzaneh

Avertissement! Ce dossier n’a pas été rédigé par une intelligence artificielle (IA)!

En juin 2019, nous vous proposions un premier dossier sur le sujet de l’IA, qu’il est possible de relire ici. Depuis, tant de choses ont évolué! 

D’ailleurs, s’il est un sujet qui est sur toutes les lèvres, les claviers et les écrans depuis quelques mois, c’est bien celui de l’intelligence artificielle appliquée à pratiquement toutes les sphères d’activités. À la fin novembre 2022, la face du monde a changé avec le dévoilement public de l’IA générative d’OpenAI, ChatGPT. Pourquoi cet événement a-t-il été si marquant? C’est que, pour la première fois, un outil d’intelligence artificielle était livré gratuitement à tous, dans une forme accessible et utilisable par le grand public. Ainsi, l’aura de science-fiction associée à l’IA venait de tomber!

Jusqu’à maintenant, il est vrai que les différentes applications de l’intelligence artificielle avaient l’air bien obscures pour la majorité d’entre nous. Pourtant, elles étaient déjà sorties des laboratoires de recherche et commençaient à gagner les entreprises (ex. robotisation des usines, optimisation de trajets de livraison, personnalisation du commerce de détail, traçabilité de la marchandise). Ces formes d’IA relèvent davantage de l’apprentissage profond (deep learning). Elles exécutent des tâches et se perfectionnent en les répétant, devenant ainsi plus précises, mais elles ne créent pas quelque chose de nouveau.

Le bouleversement avec ChatGPT vient de sa capacité créative. D’ailleurs, depuis, une panoplie d’autres outils d’IA génératives ont été rendues disponibles. Elles rédigent et reformulent des textes, créent des images, des vidéos, bref, elles génèrent du contenu à partir d’instructions que l’humain leur donne. C’est ce pour quoi elles ont été conçues. Et c’est de là que viennent la majorité des craintes. Et si elles pouvaient remplacer les humains? Et si on pouvait faire créer par l’IA en prétendant ensuite être l’auteur de ces créations? Où est la limite de l’acceptable? Qu’est-ce qui est permis?

Plusieurs en appellent au boycott, au bannissement, à la censure de cette technologie, en réaction à la nouveauté et à l’inconnu qu’elle suscite. Et c’est tout à fait normal. Il ne s’agit pas d’adopter chaque nouvelle technologie les yeux fermés, mais bien d’en peser le pour et le contre, de réfléchir à ce qu’elle peut nous apporter (ou non), puis de se faire une opinion sur le sujet, qui sera à réévaluer au gré de l’innovation. Cela rappelle d’ailleurs cette chanson du groupe The Buggles, qui disait « Video Killed the Radio Star »!

Le monde de l’éducation est frappé de plein fouet par la démocratisation de l’IA générative. Après, la calculatrice, l’ordinateur, le Web et les moteurs de recherche, voilà une autre innovation que bouscule la tradition et bouscule les façons de faire traditionnelles.

Sébastien Tardif, directeur général de Centre de services scolaire des Laurentides, s’est récemment exprimé publiquement sur la question. Dans un article, il rappelle que, comme pour le téléphone cellulaire, l’ordinateur portable et la tablette qui sont intégrés de différentes façons dans les salles de cours de plusieurs écoles, il s’agit d’un outil qui pourrait éventuellement venir appuyer le personnel enseignant dans ses interventions, et non le remplacer. « Tout ça, ce ne sont que des outils », affirme-t-il.

« On ne pourra pas interdire l’IA. Ce serait comme interdire l’internet : c’est impossible », disent d’autres éducateurs, dont plusieurs témoignages sont présentés dans ce dossier publié dans La Presse.

« On va devoir échanger et collaborer pour bien comprendre les outils et apprendre à les utiliser », soutient pour sa part Éric Cloutier, conseiller technopédagogique au Cégep de Thetford.

Ce dossier propose de jeter des bases vers ces échanges et cette collaboration entre acteurs du monde de l’éducation. Nous y présentons une définition de l’intelligence artificielle, puis traitons de son potentiel pour le milieu scolaire, de même que de ses défis et limites. Finalement, nous proposons une panoplie de ressources pour le personnel enseignant et pour les élèves.

Table des matières

  1. Une définition de l’IA
  2. L’éthique de l’IA
  3. Qu’est-ce que ça change en éducation?
  4. Par où commencer?
  5. Des activités à découvrir avec les élèves
  6. Des façons d’utiliser ChatGPT et d’autres outils d’IA en classe
  7. Comparaison des principaux robots conversationnels
  8. Les défis et les limites de l’IA en éducation
    Conclusion
    Références

1- Une définition de l’IA

Selon le dictionnaire Larousse, l’intelligence artificielle est un « ensemble de théories et de techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence humaine ». 

De son côté, Usito nous dit qu’il s’agit d’une « branche de l’informatique ayant pour objet l’étude du traitement des connaissances et du raisonnement humain, dans le but de les reproduire artificiellement pour ainsi permettre à un appareil d’exécuter des fonctions normalement associées à l’intelligence humaine ». 

Les concepts associés à l’intelligence artificielle sont apparus dans les années 1950, nous rappelle Wikipédia. À ce moment, Alan Turing se demande si une machine peut « penser ». Dans les années 1980, l’apprentissage automatique se développe avec la conception d’ordinateurs qui peuvent déduire des « règles à suivre » en analysant seulement des données. Parallèlement, des algorithmes « apprenants » font leur apparition, c’est-à-dire qu’ils apprennent « les actions à prendre, à partir d’expériences, de façon à optimiser une récompense quantitative au cours du temps ». Le meilleur exemple demeure l’ordinateur Deep Blue, qui a remporté une partie d’échec contre un humain en 1997. Ensuite, vint l’apprentissage profond, qui est un type d’apprentissage automatique reposant sur l’apprentissage de représentations des données, par opposition aux algorithmes, qui sont spécifiques à une tâche. Finalement, les années 2010 ont permis de relever quatre défis : la perception visuelle, la compréhension du langage naturel écrit ou parlé, l’analyse automatique du langage et la prise de décision autonome. Dans la majorité des cas, les systèmes d’IA servent à classifier des données et à prédire une situation.

Il existe donc différentes spécialisations en intelligence artificielle et les progrès se font rapidement. L’idée n’est pas de devenir expert en la matière, mais bien d’éduquer aux divers concepts, chacun ayant ses particularités et applications dans la vie de tous les jours, même si nous n’en avons pas conscience la majeure partie du temps. 

Qu’est-ce qui se cache derrière tous ces concepts? Le fait que l’on cherche, depuis de nombreuses années, à tester les limites des machines et aussi à « augmenter l’humain » pour faire en sorte que certaines tâches plus routinières et répétitives puissent être réalisées par les machines (ou les robots, selon le nom qu’on leur donne). Mais la discipline a tellement évolué que, maintenant, ce ne sont plus uniquement les tâches ennuyeuses que l’on cherche à faire exécuter par les machines, mais toute une panoplie d’autres actions, comme conduire un véhicule par exemple. Certaines sont de nature beaucoup plus créative, comme la création de textes et d’images, tel que mentionné en introduction.

C’est ici que les enjeux éthiques font leur apparition.


2- L’éthique de l’IA

Partout à travers le monde, des voix s’élèvent pour dire « Attention, l’intelligence artificielle ne peut être développée par n’importe qui et n’importe comment ». Car, il reste que c’est bien des humains, avec tout ce qu’ils peuvent avoir de biais cognitifs, sociaux et culturels, qui conçoivent les systèmes…

« À l’image d’un iceberg, les débats publics questionnent principalement la partie visible de l’IA liée à des aspects principalement techniques : l’opacité des algorithmes et des mécanismes de paramétrage, la protection des données utilisées », écrivaient en avril 2023 un groupe de chercheurs québécois dans une lettre ouverte publiée dans Le Devoir

Ils ajoutent que « de nombreuses autres [questions] se posent et doivent faire surface plus largement, tant l’IA a et aura des répercussions dans toutes les sphères de la société. […] Les différentes applications de l’IA présentent aussi des enjeux transversaux importants pour notre société : la représentation et les biais, la discrimination, la modération, le filtrage, la sécurité et le contrôle de ces systèmes ou encore la surveillance de masse, mais aussi la question de la justification sociale de ces outils et leurs impacts sur l’environnement ».

Vous avez peut-être aussi entendu parler de cette lettre signée par un groupe d’experts du domaine, dont plusieurs Québécois (version originale de la lettre en anglais). Ceux-ci réclamaient carrément une pause de six mois dans les recherches associées à l’IA, le temps de « créer une série de protocoles et de règles pour rendre les avancées futures plus responsables et transparentes ». Ils concluaient néanmoins la lettre avec ces mots : « L’humanité peut avoir un avenir florissant grâce à l’IA ».

Faut-il craindre le développement de l’intelligence artificielle pour autant? Disons plutôt qu’il faut être conscients des dérives possibles et demeurer vigilants. Comme avec toute technologie, il est possible de faire le bien ou le mal, des inégalités peuvent être créées ou renforcées. Bref, la prudence est de mise et chacun doit pouvoir être éclairé à ce sujet. 

D’ailleurs, il faut savoir qu’il existe déjà plusieurs mécanismes visant à guider le développement des systèmes d’intelligence artificielle et que la communauté internationale se concerte de plus en plus. Ces lettres peuvent être perçues comme une manière de rappeler tout le monde à l’ordre en ce sens et de pousser les discussions et collaborations plus loin.

Petit rappel : Dans une démarche éthique, il y a au moins deux principes à appliquer en tout temps :

– ne pas nuire aux autres, ne pas leur causer délibérément un dommage;
– considérer chacun également, sans discrimination.

Des ressources en éthique de l’IA

Source : Dossier IA sur Citnum.ca


3- Qu’est-ce que ça change en éducation?

Pratiquement tous les secteurs d’activité seront transformés par l’intégration de l’intelligence artificielle. L’éducation n’en fait pas exception. Voyons ce qui change ou pourrait changer.

Tout d’abord, dans un contexte de gestion scolaire, l’intelligence artificielle offre de nombreuses possibilités, tout particulièrement en analyse prédictive pour signaler les retards significatifs dans les apprentissages, voire la détection précoce des élèves et étudiants à risque de décrochage. 

Au Québec, le Centre de services scolaire au Cœur-des-Vallées en fait déjà l’utilisation, de même que le CSS des Chênes, et ils ne sont pas les seuls. En effet, la GRICS est en train de développer un outil en ce sens qui pourra être utilisé par l’ensemble des CSS de la province. Une autre entreprise de technologie éducative québécoise, Optania, a aussi développé des modules qui peuvent être intégrés à Mozaïk-Portail (une plateforme largement utilisée par les CSS) pour effectuer une veille de profils scolaires ou pour assurer une meilleure coordination des interventions en cas de conflits.

Ces types d’utilisation de l’IA laissent présager un potentiel d’intervention plus précoce et plus soutenu auprès des élèves identifiés comme étant à risque d’échec ou de décrochage.

« On veut essayer de déceler les élèves qu’on ne voit pas, qu’on ne soupçonne pas qui pourraient être en échec ou abandonner à ces épreuves-là. On ne veut pas perdre des élèves qu’on n’aurait peut-être pas vus autrement », fait valoir le directeur général du CSS des Chênes, Lucien Maltais.

Par contre, lorsqu’on pense à l’utilisation de l’intelligence artificielle en salle de classe, le premier mot qui vient en tête de plusieurs personnes est « plagiat ». Nous avons pu le constater avec la montée en popularité de ChatGPT. Il s’agit bel et bien de l’un des dommages collatéraux associés à l’IA. D’autres systèmes d’IA ont même été mis en place dans le but de détecter le plagiat (avec plus ou moins de succès, disons-le).

Maintenant que la plus grande crainte a été exprimée, que faire? « Il ne faut pas faire semblant que ça n’existe pas. Il faut en parler », affirme Éric Cloutier. Ce type d’outils ne fait qu’offrir un rappel que le développement des technologies se fait à un rythme effréné et qu’elles sont partout dans nos vies. Le développement de la compétence numérique devient donc plus nécessaire que jamais, autrement la fracture numérique ne fera que s’amplifier. 

« Au lieu d’essayer d’empêcher les étudiants d’utiliser ChatGPT, nous devons réformer la façon dont nous enseignons. Cette réforme ne doit pas consister à trouver des devoirs astucieux pour lesquels les étudiants ne peuvent pas utiliser ChatGPT. Nous devons nous assurer que les étudiants peuvent utiliser les systèmes d’IA correctement », écrivaient récemment Claire Boine, de l’Université d’Ottawa, et Céline Castets-Renard, de l’Université Toulouse 1 Capitole, dans un article publié sur La Conversation et repris par l’École branchée.

Bref, après la calculatrice, Wikipédia, Google Traduction, Antidote et autres aides technologiques, voici maintenant ChatGPT et compagnie dans le coffre à outils de l’apprentissage!


4- Par où commencer?

1- S’intéresser à l’IA

Bravo! Vous êtes déjà en train de lire ce dossier. 

Vous trouverez aussi de nombreux articles à lire à la fin de celui-ci.

De plus, « la formation continue [des enseignants sur le sujet] est une priorité. Les instances éducatives doivent les soutenir en offrant des ressources et des formations adaptées », écrivaient Hugo G. Lapierre, chargé de cours en technologie éducative et Patrick Charland, professeur en didactique, tous deux à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), dans un article paru sur La Conversation et repris par l’École branchée. 

Quelques suggestions de formations pour le personnel enseignant : 

Formations en ligne :

Via l’École branchée :

École en réseau (ÉÉR) : 

CADRE21 : 

  • Une entrevue réalisée par Maxime Pelchat de CADRE21 avec Yves Munn, conseiller pédagogique et chargé de projets pédagonumériques à l’Université du Québec à Montréal (UQAM)

2- Engager la discussion avec ses collègues et avec ses élèves

À ce sujet, découvrez le guide d’activités pédagogiques L’intelligence artificielle qui révolutionne l’éducation est à portée de clic!, qui donne plusieurs suggestions autant pour en parler avec vos collègues que vos élèves. 

Voyez aussi l’exemple de Martin Dubreuil, enseignant dans une école secondaire de Montréal, qui a mené la discussion de façon ouverte avec ses élèves. 

Joignez le groupe Facebook ChatGPT et IA en éducation, qui est probablement la plus grande communauté d’éducateurs qui se questionnent et partagent des informations aux sujets de l’IA en éducation. 

3- Expérimenter et développer certaines compétences

Claudine Bonneau, professeure au département d’analytique, opérations et technologies de l’information à l’École des sciences de la gestion (ESG UQAM), a déjà mis ChatGPT à l’épreuve à quelques reprises. « Il faut se mettre en mode test et collectionner des exemples de ce qui fonctionne (ou non). Personnellement, j’ai passé mes questions d’examen dans l’outil et je les ai ajustées par la suite », dit-elle.

Son constat : « La délégation de tâches ne peut pas se faire sans vérification humaine. Et pour faire la vérification, ça prend des compétences préalables. Autrement, on se laisse berner. Le jugement critique et les connaissances générales restent indispensables ».

Il s’agit probablement là du plus grand apprentissage fait par les personnes qui « s’amusent » avec les IA. Il faut apprendre à juger ce qu’elles proposent de manière critique, tout comme on a appris à reconnaître des informations crédibles en ligne (à ce sujet, voir le dossier Démystifier les compétences informationnelles : planifier, chercher, évaluer et utiliser l’information. 

Et c’est aussi une compétence que les jeunes doivent avoir la possibilité de développer. Autrement, ils risquent de l’apprendre à leurs dépens! Les outils d’IA générative, comme ChatGPT, peuvent suggérer des réponses, mais il ne suffit pas de les copier-coller et de les prendre pour la pure vérité. Il est essentiel de valider les informations présentées.

De même, ChatGPT n’est pas un moteur de recherche ni une encyclopédie. Pour cela, il y a déjà Google et Wikipédia. Il est inutile de lui demander des informations de type biographique. Le risque d’erreur est décuplé. Il faudra donc apprendre à l’utiliser pour ce qu’il est : un soutien à l’organisation des connaissances.

En ce sens, l’art du « Prompt », soit apprendre à questionner les IA de manière efficace, est une autre compétence à développer. Autrement, on risquerait de passer à côté de belles opportunités de réponses. Voici d’ailleurs une banque de prompts à destination des éducateurs, pour construire des séquences, réaliser des activités ou évaluer.

Voici une progression de l’utilisation de l’IA proposée par Simon Duguay, enseignant au secondaire, à partir du modèle passif participatif des usages du numérique en éducation de Margarida Romero.

Pour des activités concrètes, passez à la section suivante!


5- Des activités pour découvrir avec les élèves

Il peut être intéressant par commencer à s’intéresser à l’IA et à ses concepts avant d’utiliser les outils disponibles. 

Comme enseignante ou enseignant, vous pouvez réaliser vous-même des activités avec vos élèves. Si vous ne vous sentez pas assez à l’aise, sachez que plusieurs organismes proposent des activités clés en main et peuvent se déplacer dans votre milieu (virtuellement ou physiquement). 

Pour s’initier à l’IA

À faire avec vos élèves : 

À accueillir dans votre classe : 

Pour faire de l’IA

  • Initiation à l’Intelligence Artificielle – Activité en classe : Cet atelier vous permettra d’apprendre le fonctionnement de l’IA à vos élèves. L’atelier est en deux parties, d’abord un atelier ludique débranché, puis une démonstration via un outil numérique qui permet d’entraîner une IA. 
  • Quick, Draw (reconnaissance graphique) : Ce jeu se base sur l’apprentissage automatique. Vous dessinez, et un réseau de neurones tente de deviner ce que votre dessin représente. Bien sûr, il n’y parvient pas toujours, mais plus vous jouez, plus le réseau s’améliore.
  • Teachable Machine (reconnaissance photo) : Prenez (automatiquement!) une série de centaines/milliers de photos avec la caméra de votre appareil et l’algorithme pourra ensuite faire de la reconnaissance parmi celles-ci. Une belle façon de voir comment on entraîne une IA, les biais du programmeur et la reconnaissance faciale et ses possibles dérives.
  • Web Speech API Demonstration (reconnaissance vocale) : testez un algorithme avec la reconnaissance de la voix.
  • Character.ai (en anglais seulement, gratuit) : permet de discuter avec divers personnages fictifs ou historiques (attention, certains personnages pourraient ne pas être appropriés dans un contexte scolaire).

Par ailleurs, des idées d’activités sont aussi présentées dans ces deux articles parus sur l’École branchée : 

Le CSS des Affluents propose aussi : 


6- Des façons d’utiliser ChatGPT et d’autres outils d’IA en classe

Voici maintenant des pistes pour utiliser plus spécifiquement les outils d’IA en classe avec vos élèves et pour vous appuyer au quotidien.

Sensibiliser vos élèves et les amener à utiliser des outils d’IA dans un contexte pédagogique, c’est bien. Mais si vous pouvez aussi vous en servir pour soutenir la réalisation de certaines de vos tâches plus répétitives et vous aider à devenir plus efficace, rapide ou précis, alors là, ce sera encore mieux! Les outils vont-ils remplacer les enseignants comme certains le craignent? Il faut probablement les voir plutôt comme des assistants et des aides à la prise de décision.

Matt Miller, de Ditch that Textbook, propose 20 façons d’utiliser ChatGPT en classe. Avec sa permission, nous diffusons la version française de l’infographie qu’il a créée, traduite par Alexandra Coutlée. Vous pouvez obtenir d’autres informations sur l’utilisation de ChatGPT en classe sur ditchthattextbook.com/ai (en anglais).

Matt Miller propose également 30 outils d’intelligence artificielle pour la classe. Par contre, plusieurs ne sont encore disponibles qu’en anglais.

Un répertoire d’applications est maintenant disponible sur le site de l’École branchée. Il continuera d’être bonifié au fil des semaines.

Matt Miller présente une explication (en anglais) pour chacune des 20 façons sur son site Web.

Quelques exemples concrets

Tommy Berben, formateur à l’eduLAB et enseignant à l’Institut Sainte-Begge Andenne en Belgique, a accompagné ses élèves de 2e année du secondaire pour qu’ils utilisent ChatGPT afin de préparer un exposé scientifique. L’IA a aidé à la rédaction en structurant les idées récoltées par les élèves lors de leur recherche documentaire. 

De son côté, Laurent Di Pasquale, également formateur à l’eduLAB et enseignant au secondaire, a initié un travail de recherche avec ses élèves des classes de sciences sociales (univers social au Québec) afin de s’interroger sur la place de l’IA dans la société. Il présente la démarche dans une publication sur Facebook. Il vient également de publier sur le site Web de l’eduLAB un article qui présente sa réflexion, des ressources et de nombreuses idées d’intégration en classe.

Simon Duguay, enseignant à l’école secondaire de Rochebelle, à Québec, et instigateur du groupe Facebook ChatGPT et IA en éducation, a créé un Padlet collaboratif afin de favoriser la mise en commun des applications possibles de l’IA en éducation. Plusieurs thématiques sont déjà présentes comme Créer du matériel pour les élèves, Aide pour les élèves, Aide avec les tâches administratives et Analyse documentaire. 

Par ailleurs, au Collège Sainte-Anne, quelques enseignants proposent des activités en classe de langue, d’histoire et d’éthique et culture religieuse. Quelques exemples d’utilisation sont présentés dans cet article.

Parcourez aussi cet article publié sur Eductive, qui propose d’autres exemples d’activités : ChatGPT: Des idées pour enseigner, apprendre et évaluer


Petite astuce avec Kahoot!


7- Comparaison entre les principaux robots conversationnels

Section réalisée par Keivan Farzaneh, conseiller pédagogique principal en intelligence artificielle au Centre d’innovation et d’expertise en pédagogie (CIEP) du Collège Sainte-Anne

Une multitude de robots conversationnels sont accessibles sur le Web. Ils ont tous un objectif commun : générer du contenu à la suite d’une requête fournie par l’utilisateur ou l’utilisatrice. Il convient donc d’en faire un comparatif pour faire un choix éclairé en contexte de classe.

À l’heure d’écrire ces lignes, ChatGPT est probablement le robot conversationnel le plus utilisé, mais il existe d’autres outils similaires qui s’avèrent efficaces. Nous en ferons un comparatif ci-dessous.

ChatGPT

Le fameux agent conversationnel développé par la firme OpenAI se passe de présentation. La version de base de l’outil est gratuite, mais l’achat d’un abonnement à ChatGPT Plus confère certains avantages dont nous discuterons un peu plus loin. Il est à noter qu’en plus de la version Web, ChatGPT dispose d’une application pour iPhone et iPad, qui reconnaît la voix.

L’intérêt de la version payante de ChatGPT (ChatGPT Plus) réside dans le fait qu’elle est plus performante, aussi bien en terme de compréhension des requêtes complexes qu’en terme de la qualité du texte généré, en plus de pouvoir traiter des requêtes beaucoup plus longues. Ceci est possible grâce à l’utilisation d’un modèle de langage plus évolué, ou plutôt, d’une version plus évoluée du modèle de langage GPT.

ChatGPT Plus peut effectuer des recherches sur le Web à l’aide du moteur de recherche Bing, ce qui lui permet de fournir des sources valides et cliquables. Il s’agit d’une vraie valeur ajoutée dans un contexte éducatif. Ceci lui permet d’avoir accès à du contenu diffusé après septembre 2021, contrairement à la version gratuite de la plateforme.

Bing Chat

Le robot conversationnel de Microsoft, Bing Chat, peut être utilisé gratuitement à l’aide du navigateur Edge. En plus d’être performant, il a accès au Web, peut effectuer des recherches directement sur le moteur de recherche Bing et générer des réponses à jour, tout en fournissant des sources valides et cliquables.

Bing Chat peut générer du texte, mais aussi des images, grâce à l’intégration de DALL-E.

Lorsqu’on envoie une requête, il est possible de spécifier si on souhaite que la réponse soit donnée avec un ton créatif, équilibré ou précis :

  • Le ton créatif fournit des réponses descriptives, originales et parfois même divertissantes.
  • Le ton équilibré donne un résultat balancé, à la fois créatif et précis.
  • Le ton précis fournit généralement un résultat plus bref et concis.

En plus de la version Web, on peut accéder à Bing Chat depuis un iPhone, un iPad ou un
appareil Android.

Perplexity

Simple à utiliser et efficace, Perplexity est une alternative de choix à ChatGPT. La version payante de la plateforme (Perplexity Pro) fonctionne avec une version plus évoluée du modèle de langage GPT, mais la version gratuite demeure tout de même performante. En plus d’agir comme agent conversationnel, Perplexity est aussi un moteur de recherche, ce qui lui permet de faire des recherches sur le Web et de fournir des sources valides et cliquables. En plus de la version Web, il existe une extension pour le navigateur Google Chrome ainsi que des applications pour iPhone, iPad et appareils Android.

Tableau comparatif


8- Les défis et les limites de l’IA en éducation

Bien que l’utilisation de l’intelligence artificielle présente un certain nombre d’avantages en éducation, plusieurs défis demeurent. Nous avons notamment déjà parlé de la nécessité de formation pour les enseignants et les élèves afin de développer leur compréhension des outils et leur jugement critique face à ceux-ci. 

« Il faut qu’on forme les étudiants à la techno à l’école, il faut développer la pensée computationnelle, la pensée critique face à ça. Il va falloir apprendre à être critique, à contre-vérifier », soulignait récemment Patrick Giroux, professeur de technologies éducatives à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Autrement, comme c’est le cas pour l’ensemble des technologies, la fracture numérique pourrait devenir de plus en plus importante entre ceux qui savent utiliser les outils et ceux qui ne savent pas. 

Il est aussi vrai que les risques de voir les situations de plagiat se multiplier sont bien réels, principalement au niveau collégial et universitaire. Selon Sarah Elaine Eaton, professeure agrégée d’éducation à l’Université de Calgary, la notion même de plagiat devra être revue avec la démocratisation des outils d’IA en éducation. Elle affirme que « l’écriture hybride entre l’homme et l’IA deviendra normale » et que cela pourra même « renforcer la créativité humaine qui sera inspirée par l’IA ». 

Par ailleurs, les humains ne devront pas renoncer à la notion de responsabilité face à leurs écrits. « Les humains peuvent – et doivent – rester responsables de la vérification des faits, des procédures de vérification et de l’expression de la vérité », rappelle-t-elle. Ceci doit être expliqué aux jeunes rapidement. De même, la mention des sources (citation, références, attribution) demeurera essentielle.

Finalement, « les humains sont également responsables de la manière dont les outils d’intelligence artificielle sont développés ». Il leur appartient de veiller à ce que le développement de ceux-ci se fasse dans le respect de tous et d’une façon qui soit le plus éthique possible, tel que mentionné précédemment dans ce dossier.

Dans le contexte scolaire, les défis se posent tout particulièrement lors de l’évaluation des apprentissages. Comment s’assurer que les élèves n’utilisent pas l’IA pour répondre à leur place, malgré toute la sensibilisation qui pourrait être faite en amont? Il n’y a pas de réponse unique à cette question. 

Certains évoquent la nécessité de tenir uniquement des examens papier-crayon. Cette façon de faire enlève la spontanéité de la rétroaction et n’est pas en phase avec le monde d’aujourd’hui. D’autres voudraient privilégier les examens à choix multiples. Cette façon de faire ne permet toutefois pas à l’élève de bien démontrer les apprentissages réalisés. Des plateformes d’examen en ligne sont aussi développées. Elles devront être maîtrisées par les élèves afin de ne pas créer de désavantage numérique.

Bref, le personnel enseignant aura tout avantage à se concentrer sur la triangulation des apprentissages (productions, conversations, observations), la collecte de traces d’apprentissage variées ainsi que l’évaluation des processus plutôt que des résultats finaux dans le but de limiter les cas possibles de plagiat. Les décideurs devront aussi agir en conséquence pour adapter les examens nationaux. 

Une stratégie intéressante est d’évaluer les « 3P » pour un regard pluriel sur les apprentissages :

  1. Produit (production ou performance réalisée);
  2. Processus de travail (démarche menant au produit final);
  3. Personne/propos (comportements, métadiscours sur le travail, explications de ses raisonnements, justifications de ses choix, analyse réflexive, critique de sa production, etc.).

Pas humaine, mais…

La principale limite de l’intelligence artificielle en ce moment est justement son caractère « artificiel ». Elle n’est pas humaine et a donc de la difficulté à saisir les contextes, les nuances, les émotions lorsque vient le moment de communiquer. Elle n’est pas dotée de sens moral, d’intelligence émotionnelle ou d’empathie, par exemple.

Par contre, « les utilisateurs ont tendance à attribuer des qualités humaines à ces IA, appelé l’effet Eliza, en utilisant des adjectifs pour décrire leur comportement », comme l’a soulevé la Commission de l’éthique en science et en technologie (CEST) du Québec dans un récent billet sur les enjeux éthiques qui se cachent derrière l’utilisation de l’IA en éducation. Cela pose alors le défi suivant : « certains étudiants ou enseignants pourraient-ils être amenés à percevoir et à considérer les IA génératives comme des collaboratrices dotées d’autonomie décisionnelle? ».

Dès la conception

Par ailleurs, comme dans le développement de l’ensemble des technologies numériques, mentionnons que l’intelligence artificielle n’est pas exempte de biais de conception. Il est nécessaire de se questionner sur les méthodes et sur les parties prenantes représentées dans le développement des technologies. « Est-ce que la diversité des utilisateurs et utilisatrices est prise en compte lors de la conception? Est-ce que les équipe de développement tiennent compte de la diversité de leurs besoins? Comment peut-on concevoir une technologie en favorisant la cohabitation des besoins diversifiés? » Ce sont des questions que nous avons déjà posées dans un article paru dans le numéro du printemps 2023 du magazine de l’École branchée.

Cet article de l’Observatoire de la réussite en enseignement supérieur présente des enjeux éthiques et critiques liés à la conception de l’IA, tout particulièrement au sujet de la représentativité des concepteurs de l’IA et du type de données utilisées pour « entraîner » les systèmes. 

En éducation, ces biais risqueraient « de favoriser le développement d’une IA répondant à certaines caractéristiques du corps enseignant et de la population étudiante, mais omettant les besoins de celles et ceux qui ne correspondent pas à ces caractéristiques ». À l’heure où l’on parle énormément d’égalité, de diversité et d’inclusion, il serait souhaitable de composer des équipes de conception diversifiées, dont les membres auront divers profils sociodémographiques et ethnoculturels.


Conclusion

Il est encore trop tôt pour mesurer l’impact de l’intelligence artificielle sur l’enseignement et l’apprentissage. Néanmoins, il n’est pas trop tôt pour commencer à s’intéresser aux retombées éventuelles. Les nouveautés sont nombreuses et fréquentes. Il est pratiquement impossible de tout suivre en temps réel. L’idée n’est surtout pas de tout connaître ni d’adopter tous les outils, mais plutôt de rester à l’affût de ce qui se publie sur le sujet. Au final, les objectifs d’apprentissage et les intentions pédagogiques continueront de guider le choix (ou non) des outils numériques. 

Pour le moment, voici ce que nous entrevoyons sur les tendances futures de l’intégration de l’intelligence artificielle en éducation : 

  • Miser sur l’humain
    • évaluation à l’oral, discussion
    • favoriser les mises en situation
    • favoriser la collaboration et l’esprit critique
  • Apprendre à travailler avec l’intelligence artificielle
    • l’art du prompt
    • l’esprit critique
    • la culture informationnelle
    • la compétence numérique

Certains tentent déjà de se projeter plus loin dans le futur. Nous vous laissons avec ces deux lectures : 

Répertoires à consulter:

Références

Déjà paru dans l’École branchée : 

Autres articles :

Bonne lecture!