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Voici pourquoi il est plus difficile de communiquer sur les plates-formes de vidéoconférence

Des professeurs et chercheurs au département de communication sociale et publique de l’Université du Québec à Montréal se sont intéressés à la « fatigue Zoom ». Ils proposent, dans ce texte, de prendre un temps d’arrêt afin de comprendre pourquoi il est plus difficile de communiquer en ligne sur ces plates-formes d’échanges qu'en personne.
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Table des matières

Par Justine Lalande, Université du Québec à Montréal (UQAM); Hugo Mimee, Université du Québec à Montréal (UQAM), et Stéphanie Yates, Université du Québec à Montréal (UQAM)

La pandémie de Covid-19 a bouleversé la société à plusieurs niveaux, et force est de constater que certains changements demeureront ancrés dans notre quotidien, comme l’utilisation des plates-formes de vidéoconférence (Teams, Zoom et autres).

La vidéoconférence a intégré le monde du travail, de la médecine et même des activités de consultation publique, que ce soit pour des projets d’infrastructure majeurs, des consultations gouvernementales (par exemple, pour l’application mobile de traçabilité pour la Covid-19), ou encore des consultations du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement.

Au-delà des considérations techniques et des difficultés technologiques, il y a un humain, devant la caméra, qui souhaite s’exprimer – ce qui amène son lot de défis. Nos recherches nous ont permis d’en identifier plusieurs, qui doivent être pris en considération lors des rencontres virtuelles.

La « fatigue Zoom » qui découle d’un trop plein de rencontres virtuelles et qui se présente sous la forme d’une lourdeur ou d’un engourdissement mental, est de plus en plus fréquente. Nous proposons de prendre un temps d’arrêt afin de comprendre pourquoi il est plus difficile de consulter, d’être consulté, et plus généralement, de communiquer en ligne sur ces plates-formes d’échanges.

En tant que professionnel de la participation, de professeure et de chercheuse au département de communication sociale et publique de l’Université du Québec à Montréal, nous nous intéressons notamment aux dimensions communicationnelles de la participation publique et à ses implications dans la société.

Réapprendre à décoder le « non verbal »

Le décodage du non verbal en ligne est beaucoup plus difficile, voire impossible. C’est en effet un constat partagé par de nombreux chercheurs durant la pandémie.

Comme le souligne François Richer, professeur de neuropsychologie à l’UQAM, la présence incomplète des autres « crée un manque de données sensorielles, un manque d’immersion. Les discussions sont moins fluides. On devine moins qui veut parler. On ne distingue pas clairement les regards ou les expressions faciales, on peut moins décoder les signes discrets du langage non verbal ».

Notons par exemple le flou qui existe dans les établissements d’enseignement supérieur quant à l’obligation pour les étudiants d’ouvrir leur caméra lors d’un cours. Difficile pour les enseignants de savoir si le cours est vraiment suivi, si les étudiants sont attentifs ou s’ils comprennent la matière. Cela contribue certainement au sentiment de découragement et à une baisse d’interactions dans les cours.

Décoder le non verbal en ligne augmente considérablement la charge cognitive et est l’une des causes à l’origine de la « fatigue Zoom ». Si on pense souffrir de cette fatigue, vaut mieux autant si possible diminuer nos rencontres Zoom. Privilégions de fermer la caméra, de faire des appels téléphoniques, des courriels, ou mieux, de faire des rencontres en marchant lorsque c’est possible !

Les difficultés de socialiser

Les rencontres en personne ont le bienfait de permettre la socialisation. Que ce soit en marge d’une consultation publique sur un projet ou un dossier chaud, dans une salle d’attente ou au café, c’est pour plusieurs une occasion de revoir des gens, d’échanger sur la vie de quartier, de prendre des nouvelles.

Lors de son expérience de consultations publiques virtuelles, le BAPE a constaté deux inconvénients importants, soit l’absence de dynamique sociale dans les salles, durant les travaux et pendant les pauses, et le manque d’enracinement de la commission dans la dynamique de la communauté.

Or, comment recréer cette opportunité en ligne ?

Pour combler ce besoin de socialisation, certains praticiens de la participation publique ont constaté que des participants se connectaient plus tôt pour simplement échanger pendant la période de connexion précédant le début des rencontres. Une belle façon de socialiser de façon informelle dans un contexte de participation citoyenne.

Trouver des solutions aux besoins des personnes kinesthésiques

Au cours des dernières années, bon nombre d’innovations en matière de consultation publique ont permis aux personnes kinesthésiques (qui ont souvent besoin de toucher, au-delà de voir et d’entendre) de participer activement aux démarches de consultation publique, que ce soit pour des projets énergétiques, en transport, ou en santé.

Par exemple, le Réseau de transport de Longueuil a, lors de ses consultations publiques en 2019, proposé aux participants des activités interactives, où il leur était demandé de créer leur réseau de transport idéal, en dessinant sur une carte les trajets souhaités, l’emplacement des arrêts, les fréquences de passage, tout en respectant certaines contraintes au niveau des budgets et des ressources humaines. En diversifiant les manières de consulter, il va de soi qu’on rejoint une plus grande diversité de personnes.

Or, la pandémie et la tenue de consultations à distance sont venues limiter à nouveau les possibilités de participation active des personnes kinesthésiques. Malheureusement, peu d’exemples sont documentés afin d’explorer les avenues possibles pour ces personnes, dans le contexte de consultation en ligne ou à distance.

Arrimer l’environnement personnel et familial et le contexte professionnel

Enfin, un grand défi qui s’est exacerbé durant la pandémie a été celui d’adapter son environnement de travail et son agenda en fonction des contraintes professionnelles, personnelles ou familiales.

En dévoilant son milieu de vie privée à la caméra, certains craignent une forme d’envahissement, ou peuvent être sujet à de la discrimination. De plus, les personnes introverties semblent particulièrement plus à risque d’épuisement dans un contexte de rencontres et d’échanges participatifs en ligne.

N’oublions pas que les bonnes vieilles méthodes fonctionnent toujours, d’autant plus qu’elles évitent de créer une fracture numérique avec ceux et celles qui sont moins à l’aise avec la technologie. Que ce soit via des discussions téléphoniques, des courriels d’information, ou mieux, en envoyant des vidéos explicatives que vous aurez préparées pour remplacer les rencontres Zoom.

Prenons un temps d’arrêt pour revoir nos pratiques de communication et de consultation en ligne. Reconnaissons qu’on peut avoir besoin d’intégrer différentes solutions – que parfois une pause d’écran est nécessaire, mais qu’à d’autres moments, notre besoin de socialiser est plus grand. Mais rappelons-nous surtout qu’il faut adapter la technologie aux humains, et non l’inverse.


Ces principaux défis ont été identifiés grâce au travail de recherche d’Hugo Mimee et Stéphanie Yates, dans le cadre d’un rapport pour l’Association internationale pour la participation publique, section Canada.

Par Justine Lalande, Doctorante, Département de communication sociale et publique, Université du Québec à Montréal (UQAM); Hugo Mimee, Chargé de cours – ESG UQAM, Université du Québec à Montréal (UQAM), et Stéphanie Yates, Professeure, Université du Québec à Montréal, Université du Québec à Montréal (UQAM)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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