La question était incontournable et je ne pouvais pas m’empêcher de la poser au directeur de l’école normale universitaire de Savonlinna, M. Mikko Ripatti. Bien que j’aie tout fait pour éviter d’être complaisant, il est parti à rire quand je lui ai posé LA question : pourquoi les écoles finlandaises sont-elles parmi les meilleures au monde?
Après avoir repris son sérieux, voici ce qu’il m’a répondu, sans trop prendre la peine de réfléchir :
Première raison : la société finlandaise
Selon M. Ripatti, la société démocratique est homogène, au sens économique du terme. Il affirme qu’il existe peu de différences économiques marquées entre les habitants et qu’il n’y que très peu de pauvreté parmi les 5.5 millions d’habitants. Cela a pour effet, selon lui, d’offrir un milieu plus propice à l’éducation, car elle peut devenir une priorité sociale au plan national, contrairement à l’éducation en milieu défavorisé où la priorité demeure de combler les besoins physiologiques des enfants.
Deuxième raison : la gestion des écoles
Selon M. Rippati, la gestion des écoles est efficace et centrée sur les humains. Les enseignants et les membres de la direction sont facilement accessibles, et ce, autant pour les élèves que pour les parents. Au-delà de cette accessibilité, les directeurs se livrent à des activités d’encadrement pédagogique, ce qui leur permet d’assurer une certaine animation à cet égard. D’ailleurs, ils seraient particulièrement à l’affût des nouvelles tendances en éducation ainsi que des conclusions de la recherche dans le domaine.
De plus, selon ce que quelques enseignants m’ont confié, la direction des écoles finlandaises serait naturellement ouverte aux idées provenant des enseignants et elle s’emploierait à mettre en œuvre le nécessaire pour que celles-ci soient réalisées.
Troisième raison : la formation des maitres
Selon le directeur d’école, la formation initiale des enseignants est excellente. Dans un premier temps, ce ne sont pas tous les candidats qui y sont acceptés; en effet, seuls les meilleurs candidats sont retenus. D’office, il faut donc savoir se mettre en valeur et démontrer de belles aptitudes pour la profession pour avoir l’honneur d’être sélectionné dans les facultés d’éducation finlandaises. Il ne faut pas négliger le fait que les candidats doivent être titulaires d’une maitrise pour obtenir leur brevet d’enseignement. Ils passent donc cinq années non seulement sur les bancs d’université, mais également en milieu scolaire.
De plus, une fois entrés en fonction, les enseignants ont trois journées de développement professionnel obligatoires par année pendant lesquelles ils participent à divers ateliers de formation continue de leur choix.
Enfin, il semblerait que les enseignants accordent naturellement de l’importance à leur démarche de formation continue. La formation continue est donc très fortement ancrée dans la mentalité professionnelle.
Quatrième raison : autonomie professionnelle
Les enseignants finlandais jouissent d’une grande liberté professionnelle. Ils peuvent faire des choix d’approches et d’outils pédagogiques en plus de ceux concernant les modalités d’évaluation. Autrement dit, il s’agit d’un système scolaire fortement décentralisé et géré localement par les instances municipales.
Le développement professionnel est, nous l’avons vu, fortement ancré dans les préoccupations professionnelle, ce qui a permis aux enseignants finlandais d’intégrer facilement les technologies ou d’employer de nouvelles approches pédagogiques.
De plus, M. Ripatti me confiait de façon informelle qu’en Finlande, la crédibilité et la confiance accordées aux enseignants sont très élevées. En effet, il y aurait en Finlande trois professions qui jouissent de la confiance de la population et qui génèrent un capital social impressionnant (sans égard à l’ordre) : les militaires, les policiers et les enseignants!
Il n’y a donc pas de raison principale qui explique que les écoles finlandaises sont parmi les meilleures au monde. En fait, c’est une combinaison de facteurs qui est à la base de leur succès et de leur réputation internationale.
Cet article fait partie d’une série publiée par notre auteur et collaborateur Marc-André Girard, dans le cadre de sa participation au Laboratoire d’innovation et du numérique en éducation (LINE) à l’Université de Nice Sophia Antipolis.
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