L'École branchée, un organisme à but non lucratif

Mieux connecter les parents et les écoles à l’ère du numérique

Dans le cadre de la 5ᵉ édition de l’événement Ludovia#BE, une table ronde intitulée « e-Parentalité, connecter parents et école : un défi? » a rassemblé divers experts et acteurs du milieu éducatif de trois pays pour explorer les défis de la coéducation et des relations école-famille à l’ère du numérique. Retour sur les échanges.

Publié le :


Le 24 octobre, une table ronde modérée par Olivier Ruol a réuni Stéphanie Dionne (L’École Branchée), Huu-Minh Nguyen (enseignant), Bérénice Vanneste (Média Animation), Alain Doutrelepont (enseignant, référent numérique) et Jean-François Cerisier (Laboratoire Techné, Université de Poitiers) pour aborder les enjeux du numérique au sein des familles et de la relation école-famille. L’objectif était d’explorer comment renforcer la coéducation et rassurer les parents quant à l’usage des technologies par leurs enfants.

La table ronde avait été précédée d’une conférence de Jean-François Cerisier dont vous pouvez lire le résumé dans cet autre article.

D’entrée de jeu, les intervenants ont fait remarquer que la présence des outils numériques dans les écoles peut créer de la confusion chez les parents, surtout lorsque ceux-ci ont l’impression que les usages ne font qu’ajouter du temps d’écran supplémentaire. De là, l’importance de mieux communiquer les usages qu’ils font du numérique avec les élèves. 

De plus, certains parents se sentent tout simplement dépassés par l’étendue des compétences nécessaires pour accompagner leurs enfants à l’ère numérique. À ce sujet, les intervenants se sont faits rassurant : être un « eParent », ça s’apprend. Ils ont rappelé que les parents n’ont pas besoin de maîtriser toutes les technologies pour bien encadrer leurs enfants, mais qu’ils doivent acquérir suffisamment de confiance pour instaurer des habitudes saines, à l’instar de leur rôle dans d’autres aspects de la vie quotidienne.

« Ils ne sont pas dentistes, mais ils apprennent à leurs enfants à se brosser les dents », a par exemple illustré Bérénice Vanneste.

Trouver l’équilibre 

Les intervenants ont souligné que le numérique est censé renforcer le lien entre école et famille, mais que la méconnaissance de certains parents vis-à-vis de ces technologies peut parfois créer une barrière. Stéphanie Dionne a suggéré que l’école devrait non seulement rassurer les parents, mais aussi les guider dans la recherche de solutions adaptées pour une utilisation équilibrée des écrans à la maison. 

Elle a donné un exemple très concret que les parents peuvent utiliser à la maison. Il s’agit d’amener l’enfant à répondre à trois questions avant qu’il ou elle utilise un appareil numérique, dans le but de les aider à réguler leurs habitudes : 

1. Qu’est-ce que je vais faire?
2. Pendant combien de temps?
3. Et que vais-je faire ensuite? 

Ces questions fonctionnent aussi avec les adultes!

Et certains feront nécessairement des usages questionnables. À ce moment, « il faut rebondir sur les dérives des enfants, les questionner sur les raisons de leurs comportements, les amener à réfléchir à ce qu’ils auraient pu faire de différent. Tout cela pour éviter qu’ils les reproduisent à nouveau », a ajouté Stéphanie Dionne.

Vers une autonomie numérique

Les spécialistes ont encouragé un passage progressif de la régulation parentale vers l’autorégulation des enfants. Ce processus d’autorégulation nécessite des conseils et des balises claires pour éviter que les enfants ne tombent dans les pièges des plateformes numériques. Bien que celles-ci soient conçues pour retenir les utilisateurs le plus longtemps possibles (parfois, si on arrête de jouer avant la fin d’un jeu, on perd tout), les parents peuvent aider leurs enfants à devenir plus conscients de leurs propres comportements en ligne. 

Ils doivent aussi pouvoir avoir une représentation claire de ce que font leurs enfants avec leur appareil numérique pour éviter de tomber dans les présuppositions. Cela implique un dialogue ouvert avec eux. De même, ils ont la responsabilité d’amener leurs enfants à développer des champs d’intérêt les plus variés possibles, et ce surtout en dehors des écrans.

Par ailleurs, la « technoférence » — l’interférence des technologies dans les interactions familiales — est aussi une réalité qu’il ne faudrait plus hésiter à nommer, croient les experts. En effet, selon des statistiques belges, 42 % des jeunes estiment que leurs parents passent trop de temps sur leurs propres écrans. Reconnaître cette influence mutuelle pourrait être une première étape pour instaurer des habitudes numériques plus saines et équilibrées au sein des familles.

Apprendre des expériences numériques de la pandémie

Enfin, les participants ont discuté des impacts de la pandémie, qui a permis de mieux intégrer le numérique dans l’éducation tout en révélant certains défis. Si de nombreux parents et enseignants ont vu les bienfaits d’un usage pédagogique du numérique, la fin de la pandémie a aussi entraîné un recul dans les pratiques, souvent par crainte du « trop d’écran ».

Or, ce serait un piège de diaboliser les outils numériques et de verser seulement dans les interdictions. Il faut aussi penser aux usages positifs et au bien-être. Par exemple, Jean-François Cerisier a évoqué la « reconquête des espaces personnels » par les jeunes. De tout temps, les jeunes ont eu besoin de lieux de jeu et de développement social non contrôlés par les adultes. Aujourd’hui, les plateformes numériques représentent le seul espace non régi par les adultes qu’il leur reste à explorer.

Finalement, tous se sont accordé sur la nécessité d’un accompagnement continu pour s’assurer que le numérique soit un outil d’apprentissage et non une source de stress ou d’isolement, autant pour les jeunes, les parents que le personnel enseignant. Cette table ronde a permis de mettre en avant l’importance d’un dialogue constant entre l’école et les parents, ainsi qu’un besoin partagé d’autonomie et de responsabilité pour bâtir une coéducation numérique adaptée au contexte actuel.


L’École branchée remercie l’Agence du numérique éducatif (AdN) de la Wallonie et le Ministère des Relations internationales et de la francophonie du Québec, dans le cadre du 13e appel à projets Québec – Wallonie-Bruxelles, pour la biennie 2024-2026, pour avoir permis la participation à cet événement.

À propos de l'auteur

Martine Rioux
Martine Rioux
Martine Rioux est rédactrice et gestionnaire de projets d’éditions numériques. Au fil de ses expériences, elle a développé une solide expertise en lien avec la transformation numérique dans divers secteurs d’activités (éducation, culture, administration publique, etc.). Elle maîtrise les subtilités de l’univers numérique, ses enjeux, ses possibilités et sait les vulgariser en deux clics de souris. Elle est notamment rédactrice en chef des médias de l’École branchée. Son rêve : que chacun ait accès à la technologie et puisse l'utiliser comme outil d’apprentissage et d’ouverture sur le monde.

À lire aussi

Parentalité à l’ère numérique : repenser la coéducation avec l’école

Dans le cadre de la 5ᵉ édition de l’événement Ludovia#BE, Jean-François Cerisier, de l’Université de Poitiers en France, a présenté une conférence sur le thème de la e-parentalité et de la coéducation avec l’école. À travers ses propos, il a exploré les nouvelles dynamiques créées par le numérique dans les relations entre les parents, les enfants et le personnel éducatif. Voici un résumé de sa présentation.

Coenseigner avec les parents pour favoriser l’inclusion, le rendement et le bien-être : une pratique gagnante qui devient un projet de recherche doctorale

Awa Ndiaye enseigne au Conseil scolaire Viamonde, dans le sud de l’Ontario, donc en contexte francophone minoritaire. Tôt dans sa carrière, elle a cherché à collaborer plus étroitement avec les parents de ses élèves pour maximiser son propre développement professionnel et développer du même coup un sentiment d'engagement communautaire qui facilite sa gestion de classe. Elle passe maintenant de la pratique à la théorie en formalisant son cadre expérimental dans un projet de recherche doctorale, rien de moins! 

Bulletin et communication avec les parents (et les élèves)

Sujet délicat par excellence dans le milieu de l’éducation, la remise du bulletin scolaire représente parfois un défi de communication entre les enseignants et les parents, et même entre les parents et leurs enfants. Voici quelques éléments à prendre en considération.

Reproduction de textes et usage de l'intelligence artificielle

Sauf dans les cas où la licence est expressément indiquée, les articles de l'École branchée sont soumis au droit d'auteur. Toute demande de reproduction doit être adressée à l'organisme de gestion des droits Copibec.

Dans son processus éditorial, notre équipe fait appel à des technologies intégrant l'intelligence artificielle pour améliorer les textes, entre autres par la reformulation de passages, la révision linguistique, la traduction et la synthèse des idées. Tous les textes sont révisés par des humains avant leur publication.

Vos commentaires

Pour commenter un article et y ajouter vos idées, nous vous invitons à nous suivre sur les réseaux sociaux. Tous les articles y sont publiés et il est aussi possible de commenter directement sur Facebook, Twitter, Instagram ou LinkedIn.

Recevez l'infolettre Hebdo

Recevez l'infolettre Hebdo mardi #Actu et vendredi #DevProf pour ne rien manquer des nouveautés de l'École branchée!


Faites briller vos projets pédagogiques et pratiques gagnantes!

Chaque histoire positive a le potentiel d'inspirer d'autres acteurs de l'éducation à innover pour améliorer la réussite éducative! L'École branchée vous offre ses pages pour faire circuler l'information dans le milieu scolaire, alimenter la veille professionnelle et valoriser les initiatives émanant du terrain. Allez-y, proposez-nous un texte! >