« Le projet vise à sensibiliser les jeunes Québécois aux grands principes de la finance personnelle et donc à les aider à mieux planifier leur avenir financier et se donner des outils pour atteindre des objectifs de vie qu’ils peuvent avoir. Nous souhaitons également observer l’évolution de leurs comportements sur plusieurs décennies », a résumé la professeure Marie-Claude Beaulieu.
Elle ajoute : « Le contexte économique actuel fait en sorte que les jeunes disposent de plus en plus tôt d’argent à gérer, il devient essentiel de les accompagner dans leur apprentissage. Pour prendre de bonnes décisions financières, il faut comprendre la valeur de l’argent. »
Initiée en novembre 2022, l’étude comble un vide dans la recherche en s’intéressant à une clientèle rarement étudiée : les adolescents. « Il se fait beaucoup de choses pour sensibiliser les jeunes aux finances, mais on en sait peu sur ce qu’ils comprennent réellement ou comment ils se projettent dans l’avenir », note Mme Beaulieu. En suivant les mêmes jeunes à travers le temps, son équipe souhaite observer les effets cumulatifs de leur littératie financière et de leurs choix sur leur bien-être économique futur.
Une expérience complète, éducative et accessible
Le cœur du projet est un vaste questionnaire disponible chaque année durant le mois de novembre, dans le cadre du Mois de la littératie financière. Composé de 109 questions, il peut être complété en ligne, en français ou en anglais, en environ une heure. Les jeunes peuvent y répondre sur une base individuelle. Par contre, la chercheuse souhaite que de plus en plus d’enseignants du 2ᵉ cycle du secondaire prennent l’initiative de faire répondre leurs élèves. « Le questionnaire a été bâti de manière à ce qu’il soit en complémentarité avec les contenus d’éducation financière qui sont au programme de formation de l’école québécoise », dit-elle.
Par ailleurs, l’expérience va bien au-delà du simple sondage. Les participants ont accès à une série de dix capsules éducatives sur des thèmes clés comme le budget, l’endettement, l’inflation, la planification intégrée et l’intérêt composé. Un glossaire accompagne également le processus pour permettre aux jeunes de mieux maîtriser le vocabulaire associé à l’univers financier.
Immédiatement après avoir complété le questionnaire, les participants reçoivent une rétroaction personnalisée qui leur permet de mieux se situer dans leur cheminement financier. Des profils ont été établis par l’équipe de recherche en fonction des intérêts des jeunes pour la finance. Ils obtiennent également une rétroaction sur leur niveau de littératie financière — la moyenne actuelle se situe à 8,7 sur 15 — ainsi qu’un regard sur la cohérence entre leurs comportements actuels et leurs projets de vie.
« La démarche vise à favoriser la réflexion sans porter de jugement. C’est un moyen de les amener à se questionner sur le présent et leur avenir à la fois : veux-tu devenir propriétaire? Prendre ta retraite tôt? Et si oui, tes comportements financiers actuels vont-ils dans ce sens? », explique Marie-Claude Beaulieu.
Des résultats déjà prometteurs
En trois éditions, le projet a recueilli les réponses de plus de 3 600 jeunes. Les premiers constats sont éclairants : deux jeunes sur trois affirment que l’exercice aura un impact sur leurs décisions financières futures.
Les données ont également permis de dégager plusieurs tendances sur les prédicteurs de la littératie financière et de l’épargne. Ainsi, les garçons démontrent plus d’intérêt et de confiance que les filles. Celle-ci sont généralement plus consciencieuses, mais aussi plus stressées, dans la gestion de leur argent personnel. L’expérience d’un emploi rémunéré semble avoir une influence majeure et positive sur l’épargne, surtout lorsqu’elle s’accompagne de l’absence d’argent de poche, révélant une corrélation entre autonomie financière et responsabilisation chez les jeunes. Néanmoins, de façon générale, les garçons expriment moins d’intention d’épargner que les filles.
Ces premières analyses alimenteront la suite des travaux de recherche menés par l’équipe, toujours dans l’objectif de mieux comprendre les jeunes et de soutenir l’éducation financière de manière ciblée et adaptée.
Vers un suivi longitudinal à long terme
« La richesse de ce projet réside dans son volet longitudinal », affirme Mme Beaulieu. Cette étape devrait se mettre en place au cours des prochaines années. En invitant les participants à reprendre le questionnaire tous les cinq ans, les chercheurs espèrent pouvoir observer (ou non) des changements dans les profils financiers, la littératie, et les comportements d’épargne ou d’endettement des participants au fur et à mesure qu’ils franchiront d’autres étapes de leur vie. Visitez le site du projet.