Avec un regard post-pandémique, le psychologue et spécialiste de la réussite scolaire, Egide Royer, propose cinq occasions à saisir pour favoriser le bien-être des jeunes. Il les a récemment exposés dans le cadre de l’événement À distance mais présent en enseignement au secondaire (ÀDMPES), organisé par le Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec (CPIQ).
1- Améliorer la littératie en santé mentale
« On n’a jamais autant parlé de santé mentale et avec raison! Si un jeune ne se sent pas bien, comment peut-il être dans une disposition pour apprendre? »
Or, avec la pandémie, les symptômes dépressifs et anxieux ont augmenté chez les jeunes, particulièrement chez les filles, indique M. Royer en citant l’étude longitudinale du développement des enfants du Québec.
Selon lui, des petits gestes simples peuvent être mis en place au quotidien par les enseignants pour offrir ce qu’il qualifie de « premiers soins en santé mentale ». Prendre quelques minutes en début de journée pour s’intéresser aux élèves, leur demander comment ils se sentent, rappeler des stratégies de relaxation avant un examen, féliciter et encourager les bons coups. « On ne demande pas aux enseignants de devenir des spécialistes de la santé mentale, juste de développer des réflexes d’intervention préventive. »
2- Poursuivre le développement de l’utilisation pédagogique des technologies
La pandémie a fait en sorte que les écoles se sont équipées massivement en appareils technologiques, les enseignants ont découvert des nouveaux outils pédagogiques. Selon M. Royer, l’exploration de ces ressources doit se poursuivre en se référant « à la recherche pour donner des indications claires sur l’utilisation pédagogiquement optimale des technologies ».
Il y voit plus particulièrement « une sorte de promesse » pour les jeunes en difficulté ou en retard scolaire. L’utilisation du numérique a d’ailleurs permis d’augmenter le soutien et de varier les formes d’aide pour ces élèves : tutorat, bonification d’Alloprof, cours d’été en ligne. « Il y a des services offerts et des manières de faire qui sont porteurs pour eux. De plus, il croit qu’il y a des clientèles pour lesquelles l’enseignement à distance à une valeur ajoutée.
3- Intensifier les interventions en amont auprès des jeunes vulnérables
L’utilisation des technologies est un élément parmi d’autres pour intervenir auprès des élèves en difficulté. Celui qui a fait de la réussite scolaire son cheval de bataille depuis de nombreuses années a répété l’importance de repérer rapidement les jeunes vulnérables et de multiplier les interventions auprès d’eux, tout particulièrement auprès des garçons qui sont à son avis « sous-scolarisés » au Québec.
Il a parlé d’offrir des programmes de mentorat aux élèves pour les soutenir. « Ceux qui ont des mentors abandonnent moins au secondaire », a-t-il affirmé, avant de donner l’exemple d’étudiants de niveau collégial qui accompagnent des jeunes du secondaire dans la région de Valleyfield. Il a aussi rappelé l’importance de présenter des modèles de réussite aux jeunes. « On présente beaucoup de modèles féminins, et c’est correct, mais n’oublions pas les garçons. »
4- Développer une politique commune des services aux élèves à besoin particulier
32 % des élèves du secondaire public sont considérés comme des élèves à besoin particulier. « C’est énorme et ce n’est pas naturel. » Selon M. Royer, le modèle actuel qui s’appuie sur le diagnostic médical pour offrir des services aux élèves ne tient plus la route. « On passe beaucoup trop de temps à évaluer les élèves, intervenons! »
Il propose que le modèle de réponse à l’intervention soit utilisé pour déterminer les accommodements plutôt que d’offrir des mesures basées sur un diagnostic. Il invite aussi à assurer une meilleure cohérence et continuité entre le secondaire et le cégep et à réfléchir à une réforme commune (primaire, secondaire, collégial) de la politique de services aux jeunes qui présentent des besoins particuliers.
5- S’appuyer sur la recherche et les données probantes pour prendre des décisions
La pandémie a fait en sorte qu’on n’a jamais autant parlé de recherche scientifique dans les médias. Le monde de l’éducation doit aussi s’intéresser à ce qui se passe du côté de la recherche, selon M. Royer. Les pratiques exemplaires identifiées par les chercheurs doivent pouvoir être diffusées plus largement, dit-il.
« Tout comme la santé publique, autant que faire se peut, nos décisions et interventions en éducation doivent reposer sur la recherche », a conclu celui qui milite d’ailleurs en faveur de la création d’un Institut national d’excellence en éducation (inspiré de l’Institut national d’excellence en santé publique).