L’intelligence artificielle en éducation : une transformation sous le signe de l’humain

Revoyez les échanges de cette table ronde.

La table ronde « Intelligence artificielle : la nouvelle affaire au service des enseignants », animée par Stéphanie Dionne de l’École branchée et appuyée par Maxime Pelchat du CADRE21, a eu lieu le 12 février en compagnie des invités suivants : Simon Duguay, Marc-André Girard, François Lake, Jonathan Ponsard et Martine Rioux. Voici quelques éléments qui sont ressortis des échanges. 

L’humain au cœur de l’intégration de l’IA

Malgré l’essor de l’IA, les intervenants ont unanimement souligné que l’humain doit rester au centre du processus d’apprentissage. L’intelligence artificielle n’a pas pour vocation de remplacer les enseignants, mais plutôt de les soutenir dans leur mission pédagogique. Marc-André Girard, directeur d’établissement au Centre de services scolaire de la Rivière-du-Nord et conseiller au Service national du RÉCIT des gestionnaires scolaires, a partagé l’un de ses mantras personnels à cet effet :

« Humaniser l’intelligence artificielle. Car avant qu’elle soit artificielle, l’intelligence est d’abord et avant tout humaine. »

Marc-André Girard

Il a souligné que les qualités humaines comme l’empathie, la bienveillance et l’esprit critique demeurent essentielles pour assurer une utilisation éthique et pertinente des technologies en classe.

Une approche collaborative et communautaire

L’apprentissage de l’IA et son intégration en milieu scolaire ne peuvent se faire de manière isolée. La collaboration entre enseignants, directions d’école et spécialistes est essentielle pour relever les défis associés à cette transformation. Jonathan Ponsard, enseignant au primaire et coordonnateur de l’Edulab, en Belgique, a insisté sur l’importance du travail en réseau :

« On peut craindre l’IA, on peut l’ignorer, mais on peut aussi l’apprivoiser, et le faire ensemble est sans doute plus engageant et confortable. »

Jonathan Ponsard

Il a d’ailleurs présenté les initiatives mises en place en Belgique pour la formation du personnel scolaire en Belgique. Cette approche favorise le partage de connaissances et l’adaptation plus rapide des enseignants, en plus de contribuer au développement de stratégies efficaces et réfléchies en groupe.

La nécessité de former les enseignants

D’ailleurs, un des défis majeurs en lien avec l’intégration de l’IA en éducation est la formation des enseignants. Beaucoup se sentent encore démunis face à l’IA et à ses impacts potentiels sur la pédagogie. Les activités de formation continue seront déterminantes pour assurer une adoption utile et éthique des outils IA en classe.

François Lake, conseiller pédagogique pour le RÉCIT de l’enseignement privé, a souligné :

« L’IA est un assistant dont l’efficacité dépend de l’intelligence humaine qui l’utilise. »

François Lake

Repenser l’évaluation à l’ère de l’IA

L’utilisation croissante de l’IA remet en question les méthodes traditionnelles d’évaluation. Plusieurs intervenants ont suggéré d’adopter des approches plus diversifiées, comme la triangulation des traces, l’évaluation orale et les portfolios. Cela permet non seulement d’éviter la tricherie facilitée par l’IA, mais aussi d’encourager des modes d’apprentissage plus authentiques et adaptés aux compétences du XXIe siècle.

Simon a par ailleurs tenu à mettre en garde les enseignantes et enseignants qui seraient portés à faire de l’hypervigilance envers les travaux produits par leurs élèves. Une relation de confiance doit pouvoir exister entre ceux-ci et leurs enseignants. Il faisait ainsi référence à un courant où des étudiants diminuent volontairement la qualité de leurs travaux de crainte de se faire accuser à tort d’avoir utilisé l’intelligence artificielle pour le réaliser.

« On ne sait pas où la technologie va être dans 5 ans, mais on a le pouvoir de préparer nos élèves à l’imprévisible. »

Simon Duguay

Outils et applications recommandés par les intervenants

Les participants ont été invités à partager des outils et applications d’IA qu’ils trouvent particulièrement utiles pour l’éducation :

• Simon Duguay recommande Teachable Machine de Google pour apprendre aux élèves à entraîner une IA, ainsi que Notebook LM, aussi de Google, pour travailler avec une IA générative qui tient compte des documents et sources qu’on lui précise.
• François Lake utilise aussi Notebook LM et apprécie notamment sa capacité à créer des balados (podcast) à partir des documents qu’on lui soumet, ce qui lui permet de rester informé lors de ses déplacements.
• Jonathan Ponsard présente Vittascience, une plateforme de programmation intégrant un kit IA pour les étudiants, et recommande la ressource L’IA en éducation développée par des enseignants en Wallonie.
• Marc-André Girard apprécie Napkin, un outil de résumé de texte sous forme d’infographies facilitant la communication avec les équipes et les parents.
• Martine Rioux utilise Antidote Web et son module de reformulation basé sur l’IA, qui permet de réécrire et de rendre épicène des textes tout en respectant les règles de linguistique.

Vers une intégration responsable et bienveillante de l’IA

En conclusion, cette table ronde a mis en lumière la nécessité d’une approche humaine, collaborative et adaptative face à l’essor de l’intelligence artificielle en éducation. Si l’IA représente un formidable levier pour améliorer l’apprentissage, elle doit être utilisée avec discernement, en mettant toujours l’accent sur la valeur du lien humain et sur l’importance de la formation continue.

Le dialogue et la réflexion collective resteront des piliers essentiels pour naviguer dans ce nouveau paysage éducatif. Comme l’a si bien exprimé Martine Rioux, rédactrice en chef de l’École branchée :

« Nous ne pouvons déléguer le leadership à l’IA. Non, le leadership demeurera humain et nous devons réfléchir ensemble à l’avenir de l’IA. »

Martine Rioux

Prochaines tables rondes de la série Leaders à l’ère du numérique : 

📽️ Revoyez la table ronde :

Vous pouvez aussi écouter la version balado juste ici.