Par Véronique C. Plouffe, MBA, CRHA, Professeure en administration des affaires, Collège La Cité et étudiante à l’Université Laval
Dans ce texte, Véronique C. Plouffe propose une série de stratégies visant à maximiser les résultats d’apprentissage en contexte d’enseignement à distance tout en minimisant la quantité d’efforts fournis par les enseignants, ceci afin de réduire les risques d’épuisement professionnel.
L’apparition de la COVID-19 a engendré un transfert massif vers l’enseignement à distance au printemps 2020. À l’origine, il s’agissait de pouvoir maintenir un accès à l’éducation par le biais des technologies, ce qu’on appelle de l’enseignement à distance en situation d’urgence (emergency remote teaching).
Bien qu’un récent sondage mené aux États-Unis indique que 75 % des étudiants de niveau collégial (post-secondaire) préfèrent l’enseignement en classe ou en formule hybride, plusieurs institutions ont tout de même observé certains avantages à l’enseignement à distance et envisagent de maintenir celui-ci, du moins en partie, dans leur offre pédagogique.
Dans ce contexte, il devient important de réfléchir à certains défis apportés par l’enseignement en ligne comme la santé mentale du corps professoral. Celui-ci peut expérimenter de l’épuisement, de la démotivation et un sentiment d’incompétence devant le manque de ressources ou la charge de travail trop prenante suivant le transfert vers un mode d’enseignement à distance.
Afin de réduire les risques d’épuisement professionnel, encore plus difficile à identifier en télétravail, nous vous proposons ici une série de stratégies visant à maximiser les résultats d’apprentissage possibles dans un contexte d’enseignement à distance tout en minimisant la quantité d’efforts fournis par l’enseignant. Ils parleront d’ailleurs, nous l’espérons, autant à ceux qui enseignent en éducation qu’à ceux de l’enseignement supérieur.
Une introspection s’impose
Prenez d’abord conscience de l’état d’esprit avec lequel vous abordez l’enseignement à distance. Espérez-vous que tout redeviendra « comme avant » ou encore croyez-vous que vous êtes mauvais avec les technologies? Choisir de voir l’enseignement à distance comme une occasion de croître et de développer ses compétences permettrait de modifier sa perception de la situation.
Il ne s’agit plus de survivre à l’enseignement à distance, mais d’y prospérer.
Il ne s’agit plus de survivre à l’enseignement à distance, mais d’y prospérer.
On sait que chaque prestation d’enseignement implique une bonne dose de travail préparatoire. Commencez par reconnaître votre stress, vos croyances et le travail émotionnel que requiert l’enseignement à distance. Une plus grande dose d’empathie envers vous-même pourrait vous soulager d’émotions négatives rendant le travail plus lourd à porter.
Moins, c’est plus!
Dans la préparation des activités pédagogiques, appliquez la règle des 3 R : Réduire, Réutiliser et Recycler.
D’abord, on réduit en se questionnant sur la nécessité de cette tâche qu’on veut accomplir pour atteindre l’objectif d’apprentissage. Cette activité qui prendra une heure à préparer est-elle essentielle? Cette mise en page élaborée aussi?
Ensuite, on réutilise en vérifiant si on peut adapter des activités déjà existantes. Il s’agit là d’une belle économie de temps sur la rédaction des consignes, sur la mise en page ou encore la grille d’évaluation.
Finalement, on recycle en collaborant avec des collègues et en reprenant du matériel déjà disponible sur différentes plateformes de partage (dont voici un répertoire, en anglais) ou via les éditeurs de manuels scolaires. On s’assurera alors bien sûr de respecter les droits d’auteur.
Évitez de toujours vouloir tester et utiliser de nouvelles applications. La philosophie less is more a également sa place dans le choix des outils technologiques. Vous économiserez du temps en faisant une sélection limitée des solutions qui seront les plus efficaces pour votre enseignement.
Chaque nouvel outil implique du temps pour se familiariser avec ses composantes et ajoute au temps d’accompagnement auprès des jeunes qui utilisent l’outil pour la première fois. Vous concentrer sur une petite banque d’outils bien choisis facilitera votre planification et réduira le stress associé à la nouveauté.
Allez à l’essentiel quant à l’information nécessaire et aux tâches à accomplir. Il peut être facile de tomber dans le piège de vouloir en donner un peu plus afin de couvrir toutes les bases et penser combler les attentes des apprenants. Sachant que seulement 20 à 30 % des étudiant(e)s de niveau universitaire feraient réellement la lecture des ressources obligatoires, un choix éclairé évitera une surcharge pour tous.
Petits trucs pratiques
Profitez des avantages de l’enseignement à distance pour réduire la charge de préparation des cours. Plutôt que de faire de longs exposés (tout aussi longs à préparer et plus ou moins écoutés par les étudiants), utilisez la formation asynchrone pour proposer des lectures ou des vidéos existantes. En classe, vous pourrez en profiter pour discuter et proposer des activités de mise en pratique.
Une autre idée pour réduire le temps de préparation lorsqu’il s’agit de présenter du contenu théorique est de faire appel à un spécialiste invité. Accueillir une nouvelle personne en classe a l’avantage de dynamiser le cours et attise souvent l’intérêt des étudiants pour plus longtemps, grâce à l’effet de nouveauté et le potentiel de développer leur réseau professionnel pour les plus vieux.
Recevoir une rétroaction régulière encourage les élèves à s’investir davantage dans la préparation requise entre les cours et les garde plus motivés. Profitez de votre plateforme de formation pour, si elle le permet, programmer à l’avance des messages de reconnaissance à envoyer lorsqu’un apprenant complète une tâche. Il recevra automatiquement vos messages d’encouragement.
En conclusion…
Au même titre qu’apprendre à distance requiert des habiletés particulières chez les étudiants de tous âges, enseigner à distance nécessite également de s’adapter à de nouvelles façons de faire. Bien que l’objectif de l’enseignant demeure le même, les moyens à disposition et les méthodes de travail diffèrent. Les pistes présentées dans cet article n’en sont qu’un court aperçu. Il y a fort à parier que plusieurs autres bonnes pratiques émergeront au fil du temps.
NDLR : Ce texte a d’abord été publié sur le blogue de la Chaire de leadership en enseignement (CLÉ) sur les pratiques pédagogiques innovantes en contexte numérique – Banque Nationale. Il a été édité pour sa publication dans nos pages.