Par Nicole Arsenault, déléguée pédagogique à l’École branchée
Lors d’un atelier fascinant animé par Gail Cormier, professeure agrégée à la Faculté d’éducation de l’Université de Saint-Boniface au Manitoba, les participants ont été invités à plonger dans le monde complexe de l’identité linguistique. À travers des discussions sur Harry Potter, des témoignages d’élèves du secondaire du Manitoba, et des récits de leurs propres parcours identitaires, les participants ont exploré les dynamiques de la construction identitaire, de l’insécurité linguistique, de la résilience et de la magie de la transformation.
Il faut rappeler que bien que le français soit l’une des deux langues officielles du Canada, lorsqu’on sort du Québec et de certaines régions du Nouveau-Brunswick, une tout autre réalité se profile pour les francophones, celle de la vie en situation de langue minoritaire. Et cela comporte son lot de défis, notamment en ce qui a trait à l’éducation.
🪄 La construction identitaire : un processus en évolution constante
L’identité linguistique est une notion dynamique qui va au-delà des mots et des étiquettes. Dans le cadre de cet atelier, les participants ont découvert que leur identité est façonnée par leur contexte social et scolaire. Les identités sont variées et changeantes, un terme qui s’est avéré d’une grande pertinence pour les participants de l’atelier, dont les identités linguistiques sont souvent complexes. Par exemple, certains viennent de familles complètement anglophones, ou encore leurs parents parlent une autre langue que l’anglais et le français.
🪄 Les mots que nous portons : des termes équivoques à la lumière de Harry Potter
Au cours de l’atelier, les participants ont été invités à explorer des termes tels que « francophone », « Québécois », « francophile », « bilingue », « francophone de souche » et « francophone pure laine ». Ils se sont regroupés en fonction des maisons de Poudlard, reliant habilement ces mots à des caractéristiques de chaque maison. Les discussions ont révélé la diversité des interprétations de ces termes, souvent influencées par l’origine régionale des participants.
🪄 Les conséquences des mots : inclusion versus exclusion
La conférencière Gail Cormier a établi un parallèle intéressant entre le terme « francophone de souche » et l’univers de Harry Potter, en comparant les « sorciers de sang pur » qui excluent les autres. Ce terme, non inclusif, ne tient pas compte des multiples facettes de l’identité linguistique. Au contraire, des termes comme « bilingue » encouragent une vision plus inclusive de l’identité linguistique, qui reconnaît les diverses réalités des locuteurs.
🪄 Les accents et l’insécurité linguistique : les voix de la différence
La discussion s’est ensuite orientée vers les accents, qui ont une incidence sur la manière dont les personnes sont perçues. Les accents jugés non standards ou les différences linguistiques sont parfois mal compris en éducation. Les élèves du Manitoba ont partagé leurs expériences, expliquant comment leur accent francophone unique les a fait passer pour des anglophones apprenant le français. Ces conversations ont mis en lumière le concept d’insécurité linguistique, un sentiment d’infériorité lié à la langue. Pour mieux comprendre, imaginez-vous en train d’apprendre une autre langue (comme l’anglais ou autre) et repensez à la façon dont vous vous sentiez les premières fois que vous deviez vous exprimer oralement!
🪄 Cicatrices langagières et résilience linguistique : le pouvoir de la transformation
L’atelier a mis en évidence comment l’insécurité linguistique peut laisser des « cicatrices langagières » chez les élèves, entraînant une diminution de l’utilisation du français. Cependant, Gail Cormier a souligné que ces cicatrices peuvent être transformées en résilience linguistique. En s’inspirant de l’univers magique de Harry Potter, les participants ont été invités à réfléchir à leurs « pouvoirs magiques linguistiques » et à des souvenirs positifs liés à la langue française.
🪄 Enseigner avec sagesse : encourager la résilience linguistique
Pour conclure, la conférencière a partagé des recommandations pédagogiques essentielles. Il est important d’aborder les accents, l’identité linguistique et l’insécurité linguistique en classe, car cela renforce l’estime de soi. Il est crucial de présenter une variété d’exemples d’orateurs compétents ayant différents accents et de discuter de la valeur des diversités linguistiques. « Les enseignants ont le pouvoir de favoriser la résilience linguistique et de reconnaître et de célébrer le répertoire linguistique varié de leurs élèves », soutient-elle.
En fin de compte, l’atelier a démontré que les « cicatrices langagières » peuvent se transformer en une source de résilience et de pouvoir, un message qui résonne avec les leçons de Harry Potter : « On peut trouver le bonheur même dans les moments les plus sombres. Il suffit de se souvenir d’allumer la lumière ». (Dumbledore, dans Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban).
Ainsi, pour les écoles francophones en milieu minoritaire francophone ainsi que pour les écoles qui ont des élèves qui parlent plusieurs langues, ce voyage vers la transformation linguistique devient une quête inestimable, où la résilience et la lumière émergent des cicatrices langagières.
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Nous tenons à remercier le Programme d’appui à la francophonie canadienne – Secrétariat du Québec aux relations canadiennes pour son soutien financier à l’occasion de notre participation au congrès 2023 de l’ACELF, à Winnipeg.