Par Fanny Langin, spécialiste de l’intégration de la technologie en éducation, et Robert Cardinal, enseignant, Les écoles Azrieli, Talmud Torah | Herzliah
De février à août 2024, les élèves de la maternelle à la 4e secondaire des Écoles Azrieli, à Montréal, ont collaboré pour donner vie à ce projet. Il s’agissait de la conception d’une serre autogérée abritant les semences du projet Tomatosphère. Ce projet a servi de fil conducteur entre les différentes matières et niveaux scolaires.
Les objectifs de ce projet étaient :
- favoriser la collaboration entre les différents acteurs du projet (élèves, membres du personnel et parents);
- développer les compétences numériques des élèves;
- sensibiliser les élèves aux enjeux climatiques;
- développer une démarche scientifique;
- développer l’autonomie et la créativité des élèves.
De l’espace à la serre : un projet qui prend racine
Cette histoire commence en classe de maternelle à l’école primaire Talmud Torah, alors que les élèves reçoivent de mystérieuses semences de tomates, dont certaines ayant voyagé dans l’espace, reçues dans le cadre du projet « La Tomatosphère » de Parlons sciences, en partenariat avec l’Agence spatiale canadienne.
Les leaders du projet sont donc les élèves de maternelle : ce sont eux qui entreront en contact avec les élèves de secondaire 4 pour leur expliquer le problème à résoudre et leur confier une mission de la plus haute importance : concevoir un système d’arrosage automatisé pour la serre des semences.
Pendant six mois, ce projet a été un fil conducteur entre les différentes disciplines et les divers niveaux scolaires des deux établissements. L’objectif était de faire collaborer un maximum d’enseignants, d’élèves et de matières.
Ce projet est à la fois souple et intégrateur : au fil du temps, de nouvelles activités se sont ajoutées, soit à la suggestion d’un membre du personnel, soit d’un élève qui souhaitait les intégrer au projet. C’est un projet dynamique qui permet à chacun de s’exprimer et de renforcer la collaboration entre tous les acteurs concernés.
Une aventure scientifique et numérique au cœur de l’école
Pendant l’année scolaire 2023-2024, quatre serres avec des systèmes d’arrosage automatique ont été mises en place, soit pour accueillir 250 plants de tomates régulières et spatiales. Les semences ont été plantées par un robot construit en maternelle à partir des boîtes LEGO 2.0, inspiré de la vidéo « Seeding Machine » de STEM PLUS.
Ce sont des élèves de maternelle qui ont résolu le problème rencontré avec le robot planteur. Celui-ci était trop grand pour être assez précis pour cette tâche. Ils ont eu l’idée de déposer directement les semences dans le trou sous un LEGO 2×2 pour les planter. Mission réussie! Les élèves de 4e secondaire ont travaillé sur un système d’arrosage automatique à partir de cartes Arduino, qui était enclenché par des capteurs d’humidité. Tous les élèves ont analysé, avec l’aide de leurs enseignants, la croissance des semences-témoins et des semences spatiales en fonction de leur niveau (dessins, photographies, mesures du nombre et de la taille des feuilles, rapports écrits).
Au primaire, chaque niveau scolaire était responsable d’une journée par semaine pour les mesures; au secondaire, des élèves volontaires (notamment du club d’environnement) en étaient responsables.
En plus de l’observation quotidienne des plantes, plusieurs activités numériques ont été mises en place pour favoriser l’intégration des STIM dans toutes les disciplines. Par exemple, les élèves de 1re année ont créé un piano de tomates musical grâce aux cartes Makey Makey, ceux de 3e année ont créé un film image par image du voyage des semences dans l’espace avec Canva. En 4e année, ils ont travaillé le récit en cinq temps sur le voyage de la semence dans l’espace, puis créé un générateur d’histoire grâce à l’outil de programmation Scratch et les Makey Makey.
Les élèves du secondaire ont participé à la plantation de semences d’aromates et à l’observation des plantes en cours de sciences et d’univers social. À la fin du projet, les élèves de maternelle ont planté les tomates dans le potager de l’école. Des bénévoles d’un centre pour personnes âgées du quartier se sont occupés de celles-ci pendant l’été, avec l’aide du personnel.
Des apprentissages qui portent leurs fruits
Ce projet a été lancé pour les élèves en premier lieu, mais il a nécessité la collaboration de nombreux partenaires pour sa mise en œuvre. Le premier constat a été le renforcement des liens entre les élèves de différents niveaux de scolarité. Tous les élèves de l’école primaire ont été impliqués dans le projet, mais de différentes manières, ce qui a facilité des discussions sur celui-ci pendant les temps libres en classe ou à la maison, pour les fratries.
De plus, les interactions entre les élèves du primaire et du secondaire ont également évolué grâce à plusieurs rencontres. Ces rencontres ont inclus la première visioconférence où les élèves de maternelle ont présenté le projet aux élèves de secondaire 4, ou encore la visite des élèves de primaire au potager de l’école secondaire.
La collaboration entre les membres du personnel s’est aussi développée grâce à ce projet interdisciplinaire et multiniveau, qui a permis au personnel de soutien et aux enseignants de différentes disciplines de travailler ensemble pour mener à bien ce projet d’envergure.
Les parents d’élèves étaient tenus au courant de l’évolution des tomates par l’infolettre, et ce, de manière régulière. Ce projet a permis de réunir toute la communauté scolaire.
Visiblement, il a également marqué les élèves, qui souhaitent recommencer l’expérience pour essayer les activités réalisées par les autres niveaux. Les éducateurs ont aussi contacté les responsables du projet pour inclure leur classe dans de nouvelles activités pour l’année scolaire 2024-2025.
Un autre résultat notable de ce projet est l’augmentation de la conscience écologique des élèves et de leur appréciation pour la nourriture qu’ils ont à leur disposition. Ils ont pu observer tout le processus de croissance des tomates et comprendre combien de temps est nécessaire pour produire des aliments. Ils ont aussi travaillé sur la pollinisation et l’agriculture urbaine.
Finalement, ils ont développé des compétences numériques en expérimentant avec divers outils, tels que Canva, LEGO WeDo 2.0, Scratch, Google Sheets, les cartes Makey Makey et Arduino, dans différentes matières. Ils sont visiblement plus à l’aise avec ces outils, ce qui leur a permis d’esquisser des projets numériques plus ambitieux pour l’avenir.
Ce projet a contribué à renforcer la collaboration et à faciliter le partage des connaissances entre les niveaux primaire et secondaire. Il a également stimulé la motivation des élèves, en particulier ceux ayant des besoins éducatifs spécifiques, grâce à une approche d’apprentissage diversifiée.
« Semer l’avenir à tous les niveaux » a servi de fil conducteur pour intégrer une variété d’activités dans différentes matières et différents niveaux. Le projet sera de retour pour une seconde édition en février 2025. Plusieurs nouvelles activités seront incluses.
Ce projet fut finaliste des prix de l’innovation de la FEEP 2024, catégorie projet interécole, et lauréat du prix CHAPO de l’AQUOPS, catégorie Projet remarquable, en 2024.
Références :
- Seeding Machine de STEM PLUS
- Créer un système d’arrosage automatique avec l’Arduino, vidéo de BoilingBrains
- Objectifs de développement durable de l’ONU
- Semer des graines… technologiques!, École branchée, 2022
- Serre automatisée : Faire pousser des légumes dans la classe, École branchée, 2023
- Semer l’avenir à tous les niveaux, prix d’innovation de la FEEP 2024
- Semer l’avenir à tous les niveaux : Un projet numérique, collaboratif et écologique récompensé par un Prix CHAPO, École branchée, 2024
Photos : ©Les écoles Azrieli
En complément, consultez notre numéro (V27N3) sur l’enseignement du développement durable, rempli d’exemples inspirants et de pratiques innovantes pour intégrer les 17 objectifs de développement durable en classe : Enseigner pour un avenir durable.