par Eugénie Pettigrew-Leydier
orthopédagogue, fondatrice d’AIDEOR
En ce temps de confinement, beaucoup d’orthopédagogues se mettent à intervenir en ligne. Un nouveau terme voit le jour : on parle de la « téléorthopédagogie ». Voici quelques conseils utiles pour les orthopédagogues et les enseignants en lien avec l’utilisation de la technologie, l’organisation et la planification des séances en ligne et la communication école-famille.
Par l’utilisation de la technologie, les orthopédagogues peuvent poursuivre l’accompagnement des élèves qui ont des besoins particuliers. Par contre, pour plusieurs, cette métamorphose de la pratique demande toute une réflexion.
De mon côté, je pratique la téléorthopédagogie depuis bientôt deux ans. J’accompagne majoritairement des élèves francophones scolarisés à l’étranger. J’ai, moi aussi, dû repenser ma façon d’évaluer et d’intervenir par le biais de l’écran. En orthopédagogie, la créativité est très sollicitée. Dans les circonstances actuelles, c’est justement l’occasion de l’exploiter davantage!
Après avoir repensé à la manière de faire des interventions en ligne, j’y vois plusieurs avantages : la routine du quotidien et le confort de la maison sont favorisés, la fatigue et la perte de temps liée aux déplacements sont évitées, les séances lors des vacances et des maladies bénignes sont maintenues, l’attirance du numérique favorise et facilite l’utilisation de logiciels d’aide en lecture et en écriture.
Voici donc quelques conseils pour vous, vos élèves et leurs parents sur l’utilisation de la technologie, sur l’organisation et la planification des séances en ligne et sur la communication école-famille. C’est au travers de mes expériences (et parfois par essai et erreur!) que j’ai pu recenser ces éléments essentiels.
Se préparer à la visioconférence
Sur le plan de l’utilisation de la technologie, voici quelques points intéressants. Tout d’abord, je vous conseille de suivre les recommandations de l’ADOQ sur les paramètres de confidentialité à ajuster si vous utilisez la plateforme Zoom.
Pour le travail collaboratif, vous pouvez créer un document en ligne (Google) et le partager à votre élève en ajoutant son adresse courriel (Gmail).
Avant chaque séance, il est important :
– de faire la mise à jour de Zoom si vous l’utilisez;
– de vérifier que votre connexion Internet fonctionne bien;
– de veiller à ce que la luminosité soit bonne pour que votre élève vous voit bien;
– de vous assurer que votre ordinateur soit branché ou qu’il ait suffisamment de batterie pour toute la durée de votre séance;
– de connecter votre caméra (téléphone) au besoin (utiliser un trépied pour un meilleur rendu);
– d’ouvrir votre logiciel au besoin (Lexibar, WordQ, Antidote, etc.) et les applications qui seront utilisées (OneNote, Word, Google Doc, etc.).
Vous pourriez demander à votre élève de créer un dossier « téléorthopédagogie » sur son ordinateur ou dans OneNote pour qu’il y classe les activités réalisées en français et/ou en mathématiques. Chaque semaine, créez les liens Zoom (inclure un mot de passe) de vos séances et transmettez-les aux parents (en évitant les réseaux sociaux).
Pendant la visioconférence
Au début de la séance, il est nécessaire :
– de verrouiller la réunion lorsque votre élève est arrivé (fonctionnalité de Zoom qui empêche que quelqu’un d’autre puisse se joindre à la séance);
– de vérifier que vous vous entendez bien et que vous pouvez vous voir (ajuster le son et la caméra au besoin);
– de choisir le partage du bureau si vous ou votre élève utilisez un logiciel (pas seulement la page de l’application Word, par exemple).
Je vous encourage à demander à votre élève d’ouvrir deux fenêtres en même temps et de les placer côte à côte sur l’écran, s’il doit lire un texte et prendre des notes, par exemple.
Après avoir terminé la séance, vous pourrez retrouver ce qui a été noté sur le tableau blanc de Zoom si vous en avez demandé la sauvegarde dans les paramètres de votre compte. Je vous conseille de les classer dans vos fichiers d’élèves afin de garder une trace de votre séance.
Bien organiser son temps d’intervention
Sur le plan de l’organisation (temps, matériel et information) et de la planification, vous vivez probablement une remise en question de ce qui est possible de proposer à l’élève afin qu’il comprenne les notions qui lui sont difficiles. En tant qu’orthopédagogues, nous prônons la manipulation et les interventions ludiques. En nous lançant dans des séances en ligne, et en essayant de nouvelles idées, nous réalisons qu’il y a effectivement toujours des bienfaits, malgré la distance.
De mon expérience, je remarque que les élèves sont moins fatigués parce qu’ils sauvent le temps de transport. Je les trouve plus éveillés parce qu’ils ne peuvent pas compter sur moi (physiquement) pour tourner une page par exemple. J’observe aussi une meilleure capacité à utiliser un langage clair parce que je ne peux pas autant voir à tout moment que si j’étais à côté d’eux.
Il est donc essentiel de bien vous organiser et de planifier vos séances afin de vous sentir à l’aise pour intervenir en ligne. Je vous suggère de préparer vos objectifs d’intervention et vos évaluations (au besoin), comme lorsque vous rencontrez vos élèves en présentiel.
Les jeunes ont aussi besoin de vos conseils pour organiser leur matériel de manière à ce que votre suivi soit bénéfique. Vous pouvez les inciter à classer leur matériel (de français et ou de mathématiques) dans des duo-tangs ou des cahiers à anneaux de couleurs, et de les mettre dans des boîtes distinctes, selon la matière, en incluant ce qui est nécessaire (feuilles mobiles, feuilles brouillon, feutres, règle, crayon de plomb, surligneur, etc.). Pour organiser les informations, assurez-vous qu’ils aient un fichier Word, un Google Document ou une section dans OneNote où ils prendront leurs notes à chaque fois.
Intervenir en orthopédagogie à distance
À distance, il n’est pas toujours possible d’utiliser le même matériel que lors de vos pratiques habituelles. Plusieurs solutions s’offrent à vous : utiliser des jeux en ligne, des jeux à télécharger, des applications sur une tablette, prévoir d’utiliser la fonction tableau blanc, etc. Vous pouvez continuer d’utiliser des jeux de manipulation si votre élève les a à la maison ou si vous connectez votre caméra à l’ordinateur. Aussi, votre élève pourrait préparer d’avance du matériel au besoin (faire imprimer, couper, assembler, etc.).
Durant la séance, votre élève et vous-même devez être dans un endroit tranquille, isolé du bruit et de tout stimulus déconcentrant. Gardez en tête que votre élève n’est pas obligé de faire seulement des activités numériques. Il peut continuer de faire des exercices sur papier (cahier ligné, feuilles mobiles, feuilles brouillon) ou imprimer un document que vous lui partagez. Il peut utiliser du matériel de manipulation qu’il a la maison, comme des pâtes (plutôt que vos jolis jetons), des voitures, des Legos, etc. Inspirez-vous de ses intérêts, comme vous savez le faire!
Par soucis de rentabiliser votre temps avec l’élève, prévoyez toujours près de vous le matériel dont vous aurez besoin (dés, planches de jeux, applications à utiliser sur l’ordinateur, minuteur, etc.) et du matériel pour capter son attention (au besoin). Demandez à votre élève et à ses parents de faire de même.
À la fin de la séance avec l’élève, c’est intéressant de pouvoir communiquer directement avec les parents s’ils sont disponibles. Votre élève peut reformuler ce qu’il a appris et vous pouvez compléter avec votre interprétation de ses efforts, améliorations, points à travailler, etc. C’est aussi l’occasion de proposer deux rencontres par semaine de plus courte durée si vous sentez que votre élève se fatigue trop rapidement.
Enfin, avant que la séance se termine, veillez toujours à ce que l’élève ait rangé son matériel de manière à le retrouver en ordre pour la prochaine séance!
Communiquer avec les parents
Sur le plan de la communication, vous avez possiblement expérimenté des avis de parents plutôt réticents par rapport à l’orthopédagogie à distance. Restez confiants : c’est une nouvelle pratique, et ils ont besoin d’être rassurés. Pour les mettre en confiance, une idée efficace est de leur offrir une première rencontre gratuite de 30 minutes leur permettant de découvrir l’utilisation de Zoom et de connaître la structure de vos séances en ligne. C’est aussi le moment pour vous de leur demander :
– de signer et de dater votre document type « consentement éclairé » (accepter l’utilisation de la caméra, de la fonction du traqueur d’attention, de l’utilisation du partage du bureau, etc.);
– de les prévenir de fermer toutes fenêtres confidentielles;
– de choisir un plan B si Zoom ne fonctionne pas (Hangouts, Skype, Facetime, etc.);
– de regarder leurs courriels fréquemment (ils recevront chaque semaine le lien de la séance la liste du matériel à prévoir et peut-être un lien pour créer, imprimer ou télécharger un jeu);
– d’être disponibles en fin de séance pour faire un bilan de rencontre (si vous le souhaitez).
C’est ici que mes trucs et astuces se terminent! J’espère vous avoir aidé pour vos interventions à distance. Si vous avez des questions, je suis disponible pour échanger avec vous!