Habituellement, les élèves de Marie-France Fortin entrent dans sa classe à reculons. L’enseignante de l’école secondaire Lucille-Teasdale n’est pas en cause, les jeunes auraient simplement préféré ne pas se retrouver dans une classe de renforcement. Mais cette année, ces jeunes font des envieux puisqu’ils ont tous obtenu un iPad à la rentrée qu’ils utilisent en classe et à la maison!
L’idée est née après la participation de quelques enseignants à une activité au sujet des technologies. « Au secondaire, ce n’est pas évident. Les groupes ne sont pas fixes et ils ont chacun plusieurs enseignants. Or, ma classe est un groupe fermé et j’enseigne le français, l’histoire, la géographie, les mathématiques et les sciences. On m’a donc abordée pour faire une première expérience », raconte Mme Fortin. Après avoir évalué plusieurs tablettes, la commission scolaire a opté pour l’iPad. À 600 $ par appareil, cela représente un investissement de près de 20 000 $ pris à même une enveloppe destinée aux élèves intégrés. À cela, il faut ajouter les autres équipements requis.
En juin, l’enseignante est partie avec sa tablette sous le bras afin de déterminer comment elle allait l’utiliser avec son groupe. « Pour l’instant, chaque élève doit devenir super compétent dans une application, il devient LE spécialiste. Par exemple, j’ai deux élèves dont le travail était d’explorer une application pour la prise de note et de l’expliquer aux autres. Mes élèves dyslexiques et dysorthographiques peuvent m’enregistrer et réécouter leurs notes de cours le soir. Leur devoir était de mettre ça dans un traitement de texte », explique-t-elle. Mme Fortin a dû adapter considérablement sa manière d’enseigner et est toujours en phase d’exploration. Papiers et crayons n’ont donc pas encore totalement disparu de sa classe.
Sans surprise, les jeunes sont ravis de participer à l’expérience. Mais pour éviter que les tablettes deviennent une source de distraction en classe, Mme Fortin a invité les élèves à établir des règles. « Elles doivent rester sur le coin du bureau tant que je n’ai pas donné la consigne de les utiliser. De plus, nous avons établi tout ce qui pouvait être dérangeant. Les jeunes ont décidé qu’au premier avertissement, l’élève fautif allait perdre sa tablette pour une période. Au second, c’est pour la journée et au troisième, c’est pour cinq jours. Ils sont plus durs que je ne l’aurais été », note-t-elle en riant. Jusqu’à maintenant, les tablettes ne posent pas de problèmes de discipline.
Quant aux parents, ils sont emballés. « Certains avaient toutefois des inquiétudes par rapport aux assurances s’il arrivait quelque chose. Plusieurs craignaient aussi l’intimidation de la part des autres. Nous en avons parlé en classe pour inviter les élèves à dénoncer rapidement la situation si un problème de la sorte se présentait. Nous leur avons aussi demandé de demeurer discrets au sujet de leur iPad », mentionne Mme Fortin.
Sous la loupe
On ignore pour l’instant ce qu’il adviendra des tablettes à la fin de l’année et si un plus grand groupe d’élèves pourraient en bénéficier. L’expérience est scrutée à la loupe par les différents intervenants et les collègues de Mme Fortin. « Plusieurs me posent des questions, ça les intéresse beaucoup », note-t-elle. De plus, Robert David, chercheur de l’Université de Montréal, se rendra en classe plusieurs fois au cours de l’année afin d’étudier l’impact des tablettes numériques sur la motivation des élèves.
Évidemment, plusieurs autres facteurs influencent également sur la motivation des jeunes à l’école. Le Réseau d’information pour la réussite éducation présente d’ailleurs un dossier pertinent à ce propos.
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