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Pourquoi et comment développer la littératie en IA

Entre ambitions pédagogiques, balises légales et contraintes technologiques, comment outiller les élèves – et leurs enseignants – pour développer une littératie en IA solide et critique ? De la maternelle à l’université, un chantier éducatif s’impose… même sans recourir directement à l’IA!
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Par Laurent Di Pasquale

Depuis la sortie de ChatGPT, le 30 novembre 2022, le monde de l’éducation, comme bien d’autres secteurs, connaît une course effrénée pour apprivoiser les nouveaux outils d’IA générative. Partout dans le monde, les milieux scolaires ont dû concevoir rapidement des modèles d’intégration et réfléchir aux compétences à développer, tant chez les enseignants que chez les élèves, afin de favoriser une maîtrise éclairée de ces technologies émergentes.

Un constat s’impose : le développement de la littératie en intelligence artificielle constitue désormais un incontournable, quel que soit le niveau d’enseignement concerné. Reste alors à déterminer comment atteindre cet objectif, en combinant judicieusement des pratiques à la fois déconnectées et connectées.

Voici quelques pistes. 

Que disent les référentiels, guides ou rapports? 

D’abord, allons voir ce que préconisent les guides et référentiels, tant au niveau local qu’international. 

1. À l’échelle du Québec

Dans Se préparer à un marché du travail en transformation / référentiel québécois des compétences du futur de la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT), on explique : « Les compétences en littératie et en numératie sont à la base du traitement de l’information et elles permettent d’apprendre à apprendre et de savoir lire et compter pour continuer à apprendre. La littératie et la numératie sont donc les clés pour acquérir d’autres compétences, dont les compétences du futur. C’est la raison pour laquelle on considère qu’elles servent de socle aux compétences du futur à l’ère du numérique. » Et parmi ces compétences du futur, on retrouve l’usage du numérique et l’éthique appliqués à l’IA. 

Dans son rapport Prêt pour l’IA, le Conseil de l’innovation du Québec propose, dans sa Recommandation principale 4, de « s’assurer de l’adaptation, dans les meilleurs délais, des programmes d’enseignement de la maternelle à l’université, pour que ceux-ci permettent de renforcer la littératie numérique et la littératie en IA des enfants, des élèves et des étudiants, notamment afin d’accroître leur capacité à utiliser l’IA efficacement et à exercer leur pensée critique à son égard. »

Dans les différentes dimensions de la compétence numérique (selon le Cadre de référence de la compétence numérique du Québec du ministère de l’Éducation), les notions relatives au numérique de manière générale peuvent également renvoyer au développement de ce concept de littératie en IA. Et même si cette dernière n’est pas (encore) spécifiquement précisée, une mise à jour du cadre est prévue afin de mieux intégrer les nouvelles réalités.

Dans certains cours, comme celui de Culture et citoyenneté québécoise, on nomme explicitement ces enjeux (les regroupant même sous le thème Vie numérique). C’est une excellente occasion de travailler cette littératie essentielle de manière transversale.

Dans son dernier rapport sur l’État de la situation sur les impacts sociétaux de l’intelligence artificielle et du numérique, l’OBVIA consacre un chapitre à l’éducation. On y met en lumière un besoin urgent : renforcer l’autonomie, l’esprit critique et les compétences numériques des citoyens, particulièrement dans les milieux éducatifs, dans le contexte du déploiement rapide des outils d’IA générative. Il ne s’agit pas uniquement de former des spécialistes de l’IA, mais de permettre à tous – élèves, enseignants et citoyens – d’acquérir les repères nécessaires pour évoluer dans cet environnement numérique en mutation.

Dans le résumé des recommandations de l’axe Éducation et capacitation, on peut également lire les points suivants :

  • Renforcer la littératie numérique et en IA dans tous les ordres d’enseignement, notamment en développant des contenus pédagogiques adaptés, contextualisés et ancrés dans les disciplines scolaires.
  • Soutenir les pratiques d’enseignement réflexives sur les usages de l’IA, en encourageant les espaces de dialogue entre enseignants, chercheurs et praticiens.

Enfin, notons que l’Institut canadien de recherches avancées (CIFAR) considère aussi qu’il est urgent « de renforcer la littératie en matière d’IA de la maternelle à la 5e secondaire […] et au-delà ».

b. À portée internationale 

Comme l’École branchée l’a déjà détaillé dans un précédent article, l’UNESCO, dans son Référentiel de compétences en IA pour les apprenants (2024), propose différentes thématiques et niveaux de compréhension afin de développer une littératie en IA et des compétences clés connexes. Il ne spécifie aucun âge idéal pour cette acquisition, mais les documents indiquent clairement qu’elle devrait être une priorité pour tous les individus.

De plus, l’approche de ce référentiel met l’accent sur la nécessité d’adapter l’enseignement aux capacités de l’apprenant. Celui-ci devrait développer une compréhension progressive, adaptée à son âge, et être impliqué dans l’élaboration de réglementations en matière d’IA « selon un niveau adapté à leur âge ou à leur niveau scolaire ».

2) Des enjeux pour le développement de la littératie en IA

Quel que soit le projet ou l’usage envisagé par un enseignant avec ses élèves, il demeure essentiel de s’attarder aux règles d’utilisation propres à chaque plateforme. Celles-ci peuvent notamment préciser un âge minimal pour une utilisation conforme. Une vérification au cas par cas s’impose, puisque certaines plateformes indiquent une limite d’âge, alors que d’autres ne le font pas toujours.

C’est par exemple le cas de NotebookLM, qui ne mentionne plus d’âge minimal dans ses conditions d’utilisation. À l’inverse, Canva Code précise que l’accès n’est pas permis aux utilisateurs de moins de 13 ans. 

Toutefois, dans le cadre des licences éducatives, il est possible que l’administrateur ait désactivé les fonctionnalités d’IA en fonction des politiques internes de l’établissement. En effet, l’aspect légal lié à l’utilisation de ces plateformes s’entrecroise avec les règles établies par les différents centres de services et organisations scolaires. Ces derniers peuvent autoriser ou interdire certains outils, ce qui peut aussi causer des inégalités entre les milieux.

Il ne s’agit pas ici de pointer du doigt les décisions, mais le constat invite toutefois à la réflexion : la multiplicité des règles et des approches locales permet-elle réellement de développer la littératie en intelligence artificielle de manière optimale, telle que préconisée dans les guides, rapports et référentiels mentionnés précédemment?

3) Aborder l’IA sans utiliser l’IA? 

Alors, quelle est la marge de manœuvre d’un enseignant lorsqu’il se heurte à plusieurs obstacles réglementaires?

Il importe de rappeler qu’il est tout à fait possible d’aborder l’intelligence artificielle et son fonctionnement sans nécessairement recourir à son utilisation directe en classe. Le simple fait d’expliquer ses principes, ses biais ou ses mécanismes d’apprentissage peut déjà permettre aux élèves d’élargir leurs connaissances et de développer leur esprit critique.

Ainsi, au-delà de son statut d’outil numérique, l’intelligence artificielle peut devenir un véritable objet d’étude. Intégrée à différents cours, elle offre l’occasion d’explorer les enjeux technologiques, éthiques et sociaux qui y sont liés, contribuant à une meilleure compréhension de son rôle et de ses impacts dans la société contemporaine.

Quelques exemples pour ce type d’activité :

  • Quick, Draw! : permet de comprendre comment une IA apprend et génère des réponses à partir d’une banque de données. Ludique et simple, cette application en ligne, utilisée avec les élèves, peut susciter échanges et réflexion.
  • Créer des applications à l’aide de Canva Code : comme dans cet exemple réalisé dans le cadre d’un projet intitulé Explorateurs de l’intelligence artificielle, qui amène les élèves à réfléchir à leurs usages de l’IA et à l’impact énergétique. 
  • Activités déconnectées et mimétiques : parfois, un simple crayon et une feuille de papier suffisent pour initier une réflexion sur l’IA. Par exemple, proposer un labyrinthe où il faut sortir en suivant une suite d’instructions peut déjà illustrer la notion d’algorithme. Jouer le rôle d’une IA devant identifier un dessin permet aussi aux élèves de se familiariser avec les mécanismes de génération de réponses.

En guise de conclusion

Si bien des écrits s’accordent sur le fait qu’il est indispensable de développer la littératie en IA au plus vite, il reste encore un certain nombre d’obstacles ou d’enjeux que les enseignants et les équipes éducatives devront traverser collectivement. Aussi est-il urgent de proposer des solutions simples, faciles à appliquer pour celles et ceux qui mèneront ces activités. Chaque cours et domaine d’enseignement peut être concerné et, à son niveau, contribuer au développement de cette littératie de manière transversale.

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