L’année scolaire s’amorce sous peu et on peut certainement penser qu’elle sera atypique. D’une part, les directions d’école devront gérer les activités scolaires sans savoir si elles pourront avoir lieu ou quelles formes elle prendront. D’autre part, elles devront exercer un leadership pédagogique sans connaître les nouveaux repères sur lesquels s’appuyer. Les enseignants enseigneront comme jamais et emploieront probablement des stratégies qu’ils n’ont jamais utilisées auparavant. Comment naviguer à bon port avec tous les élèves en prenant soin d’éviter les écueils qui joncheront le parcours?
Concevoir différemment l’éducation
Il y a fort à parier que la vision traditionnelle de l’éducation devra changer. L’éducation en mutation depuis quelques années s’accélère et peut prendre de court ceux qui n’avaient pas actualisé leurs pratiques professionnelles. Je ne blâme personne; bien futé celui qui aurait pu prévoir une telle situation!
On ne peut plus prendre l’école pour acquis dans sa forme conventionnelle. L’école demeurera-t-elle ouverte? Tous les élèves seront-ils au rendez-vous en classe? Dans un cas comme dans l’autre, la flexibilité pédagogique prend tout son sens. Des approches pédagogiques hybrides devront être envisagées, des plans B et C devront être élaborés. Les obligations scolaires ne sont plus exclusivement envers les élèves présents en classe, mais aussi envers ceux qui ne peuvent la fréquenter.
Bref, il faut revoir nos réflexes pédagogiques et notre conception de l’éducation ainsi que celle nous avons de notre profession et de l’institution dans laquelle nous évoluons.
Développer notre tolérance à l’ambiguïté
Comment composer avec l’incertitude? À mon avis, il faut cesser d’être dans l’attente des consignes ministérielles ou des centres de services scolaires et vivre dans le présent. Tout vient à point à qui sait attendre, les réponses à nos questions viendront au moment opportun. Cessons d’être suspendus aux éventuels plans et concentrons-nous sur les informations que nous avons pour faire mieux que ce que nous faisons de bien. La pandémie fait en sorte qu’il est difficile de prévoir ce qui se passera dans quelques mois. C’est normal que les réponses souhaitées arrivent moins rapidement qu’à l’habitude.
Hervé Sérieyx écrivait « le monde n’est incertain que pour ceux qui ont besoin de certitudes; pour les autres, il n’est que le monde de toujours avec les risques et les chances de ses hasards ». L’unique certitude est l’incertain; poursuivons notre route en acceptant que parfois il faudra prendre quelques virages prononcés à la suite d’avis tardifs et qu’il faudra peut-être revenir sur ses pas par moment.
N’oublions pas : une année scolaire, ce n’est pas un sprint, mais un marathon de dix mois.
Trouver des solutions locales
Chaque école est un organisme unique qui est un reflet de sa collectivité. Nos écoles, notamment nos écoles primaires, sont des écoles de proximité. Malgré que le problème soit le même pour tous (la pandémie), il n’y a pas de solution unilatérale. Ce qui est vrai pour une école primaire de la Gaspésie, par exemple, peut pas ne pas l’être pour une école secondaire de la région montréalaise.
Si, pour plusieurs, le leadership de crise doit se manifester par un leadership descendant (« top down »), il faut néanmoins tenter, dans la mesure du possible, l’approche ascendante (« bottom up »). La raison est simple : ceux qui sont à la base de l’école, notamment les enseignants, auront à implanter les mesures et à faire preuve d’ingéniosité. Il est donc logique qu’ils puissent exercer leur leadership. L’ouverture de la direction a un important potentiel de mobilisation. En effet, en moment de crise, donner du pouvoir à toutes les parties prenantes est une démonstration que la direction a bel et bien confiance en son équipe, et ce, même lorsque la marge de manœuvre est mince.
Autres tâches connexes
Les besoins sur le terrain seront nombreux et variés. En parallèle, les ressources se font rares puisque nous sommes déjà frappés par la pénurie de main d’œuvre et certains travailleurs de l’éducation seront exemptés de se rendre à l’école pour des raisons médicales. Cela implique que ceux qui seront présents devront faire preuve d’ouverture et de flexibilité pour varier leur occupation traditionnelle en effectuant d’autres tâches. La direction devra faire preuve de créativité pour combler les besoins de ses élèves et gérer les ressources humaines de façon créative, mais aussi de façon efficace. Peut-être même aller en classe pour remplacer un enseignant? Peut-être les enseignants devront-ils faire plus de surveillances? Faire des périodes de récupération en ligne?
Il y a fort à parier que les « toutes autres tâches connexes » des contrats de travail prendront tout leur sens cet automne vu la nécessité de sortir des descriptions de tâche.
Bref, une année scolaire incertaine se pointe à l’horizon. À présent, à nous de relever le défi et d’être à la hauteur de ce qui nous attend.