Par Alexandre Audet, enseignant
École secondaire publique Pierre-de-Blois
Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario
L’école Pierre-de-Blois en un coup d’œil :
- Où : Barrhaven (banlieue au sud-ouest d’Ottawa)
- Conseil scolaire : Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO)
- Langue d’enseignement : français
- Ouverture : septembre 2021
- Niveau : secondaire, 7e à 12e année (secondaire 1 à 5)
- Nombre d’élèves : 260 en 7e et 8e année, et 340 de la 9e à la 12e année
- Directeur : Ghislain Proulx
Le pourquoi : la vision pédagogique
« L’avenir a le don d’arriver sans prévenir. »
– George Will
Si les 24 premières années du 21e siècle nous ont appris une chose, c’est que le changement vient rapidement. Que ce soit avec l’avènement des réseaux sociaux, des téléphones intelligents ou encore de la pandémie, nos vies changent vite et il faut savoir s’adapter rapidement.
Bref, pour paraphraser Dr. A.J. Juliani, l’école ne doit plus se contenter de préparer les élèves au marché du travail, elle doit les préparer à tout ce que l’avenir pourrait mettre devant eux.
Dès sa création, l’école Pierre-de-Blois s’est donné comme mission de développer avec ses élèves un ensemble de compétences globales transférables pour réagir de façon efficace face à toutes situations. Mais plus encore, l’école veut aussi les doter d’un savoir-faire technique et technologique pratique.
Le comment : l’organisation
Toutes les écoles ont un énoncé de mission, une vision pédagogique, mais pas toutes arrivent à y donner vie. Dès sa création, l’école Pierre-de-Blois a choisi d’adapter l’horaire des cours à sa vision pédagogique.
En effet, au lieu d’avoir un horaire traditionnel (jour 1-2-3-4-5-etc.), les cours se donnent selon l’horaire du lundi, mardi, jeudi et vendredi. Et les mercredis? C’est la journée décloisonnée : pas de cours de math ni de français à l’horaire, et plus encore, on fait parfois fi des listes de classes! Beau fouillis! Alors, comment peut-on organiser 260 élèves de 10 classes et de deux niveaux (7e-8e année)?
Premièrement, le coordonnateur, M. Julien Lauriault, produit chaque semaine des horaires ad hoc pour les enseignants. Un horaire de mercredi typique donne deux périodes de design en matinée et deux périodes d’ateliers et de projets en après-midi. En arrivant en classe, les enseignants ouvrent un document (ex. Google Slides) qui explique aux élèves devant eux le travail à réaliser pendant la période. M. Lauriault produit aussi des vidéos explicatives pour enseigner les techniques et les habiletés à mettre en pratique.
Par exemple, depuis le début de l’année scolaire, les élèves ont participé à des formations en cybersécurité, des ateliers de littératie financière et ils ont eu la chance de s’entretenir avec une avocate et un policier en lien avec un projet en cours dans leurs classes.
Au fur et à mesure des semaines et de l’évolution des travaux, il arrive que les élèves soient regroupés selon le sujet de leur projet ou selon l’étape du cycle de design qu’ils ont atteint. Ainsi, il n’est pas rare de voir dans un local des élèves qui viennent de différentes classes. Lorsque c’est le cas, les regroupements sont affichés dans le corridor au préalable et les élèves se rendent dans le local qui leur est assigné.
Bref, les mercredis décloisonnés sont une opportunité pour les élèves de vivre des expériences et recevoir des formations qui apportent une plus-value à leur formation générale.
Le quoi : Les projets
Les projets utilisent tous la pensée design comme point de départ : l’empathie, l’identification de problèmes, la génération d’idées, le prototypage, le testage et la publication. Pour ce qui est du contenu, l’approche interdisciplinaire est privilégiée, notamment en visant les STIAM (sciences, technologie, ingénierie, arts, mathématiques).
Dans le cadre de leurs cours d’arts, les 7e années font un projet interdisciplinaire qui réunit le français, les mathématiques et plusieurs arts combinés (arts visuels, danse et musique). Ils doivent créer un vidéoclip d’une chanson francophone en utilisant la plateforme de codage CoSpaces. Ils doivent d’abord analyser les paroles de la chanson pour en comprendre la signification et s’assurer de produire des liens variés (français), allant de l’imagerie mentale jusqu’à l’inférence. Par la suite, les élèves apprennent à coder des actions et des personnages (mathématiques), tout en s’assurant de créer des types de danses (danse) ainsi que de produire des plans et cadrages cinématographiques appropriés (arts visuels).
En 8e année, les élèves réalisent un projet interdisciplinaire qui s’échelonne sur toute l’année scolaire. Le résultat de ce projet est de créer une bande-annonce pour leur récit de science-fiction, en utilisant la technique de photographies successives (stop motion). Ce travail englobe le français, le design et quatre disciplines artistiques.
Le tout débute dans la classe de français, où les élèves font le plan d’un récit de science-fiction. Pendant les journées décloisonnées du mercredi, ils doivent, en utilisant le cycle du design, imaginer les personnages de leur récit de science-fiction. Éventuellement, ces personnages prennent forme dans la plateforme Tinkercad, dans laquelle les élèves apprennent à construire des articulations complexes puisqu’une fois la figurine créée, elle est envoyée à une imprimante 3D.
C’est ici que le récit de science-fiction « prend vie ». En effet, pendant le deuxième semestre, les élèves utilisent la figurine qu’ils ont créée et imprimée pour faire leur bande-annonce en « stop motion ».
Cette année, un nouveau projet a été présenté aux élèves de 7e et 8e années. Celui-ci est en lien avec les Objectifs de Développement durable (ODD) de l’ONU. L’élève choisit un des ODD pour faire son projet, qui peut prendre la forme d’une campagne de sensibilisation dans la communauté, la création d’un prototype pour apporter une solution à un problème ou une expérience scientifique en lien avec l’ODD, par exemple.
Et ça donne quoi?
Le résultat de cette approche est que les élèves ont vraiment la chance de s’entreprendre, de faire, de créer au lieu de seulement « subir » l’école. Beaucoup d’écoles parlent des compétences transférables, mais l’école Pierre-de-Blois met ses élèves dans des situations qui leur permettent de vivre et de mettre en pratique ces compétences.
Le dernier mot aux élèves :
« Les mercredis, on fait une formation comme dans un emploi pour apprendre la technologie de l’imprimante 3D. C’est comme un avant-goût d’être un architecte et un programmeur à la fois. J’aimerais vraiment y travailler un jour. »
(élève de 7e)
« Ça nous donne des nouvelles compétences et connaissances plus modernes et plus utilisables pour la vie du 21e siècle. »
(élève de 8e)