Intitulée « L’IA générative en éducation : entre sidération et réassurance », la conférence de Pascal Vangrunderbeeck, lors de la troisième et dernière journée du festival Barak@TIC 2024, a permis d’aborder la dualité entre l’enthousiasme suscité par cette technologie et les préoccupations qu’elle soulève quant à son intégration dans les pratiques pédagogiques.
L’expert a commencé par souligner l’évolution rapide de l’IA générative, marquée notamment par des outils comme ChatGPT qui ont transformé notre manière d’interagir avec la technologie. Ces modèles, basés sur des architectures de transformers, offrent des capacités impressionnantes de génération de contenu multimodal, suscitant un véritable « effet wow ».
Face à l’ampleur de cette innovation, Pascal Vangrunderbeeck a proposé un cadre pragmatique pour son adoption pédagogique, qu’il nomme l’alignement constructif. Il s’agit de définir des objectifs d’apprentissage clairs, de proposer des activités en adéquation avec ces objectifs et d’évaluer la maîtrise des acquis en tenant compte du contexte d’utilisation de l’IA.
Trois postures pédagogiques face à l’IA
Le conférencier a présenté trois postures pédagogiques que l’on peut adopter face à l’IA :
- L’évitement : Certains enseignants peuvent choisir de ne pas utiliser l’IA dans leurs cours, privilégiant des activités qui ne peuvent être réalisées par l’IA, comme le raisonnement critique et la résolution de problèmes complexes.
- Le contournement : D’autres peuvent autoriser l’IA pour certaines tâches, comme la recherche d’informations ou la correction orthographique, tout en l’interdisant pour d’autres, comme la rédaction d’un essai ou la réalisation d’un devoir.
- L’intégration : Enfin, certains enseignants peuvent choisir d’intégrer l’IA de manière proactive dans leurs activités d’enseignement, en l’utilisant comme un outil d’apprentissage personnalisé ou de travail collaboratif.
Ces postures ont aussi été détaillées dans le Guide pour une approche réflexive de l’IA en éducation, par Simon Duguay et ses collaborateurs.
De son côté, Pascal Vangrunderbeeck a également insisté sur la nécessité de directives claires émanant des institutions éducatives pour encadrer l’usage de l’IA. Il a cité les recommandations de l’Université catholique de Louvain qui promeuvent la responsabilité, la transparence et l’authenticité dans l’utilisation de l’IA en éducation.
La valorisation des compétences humaines
En abordant les défis posés par l’IA, le conférencier a souligné les limites de ces technologies, telles que leur propension à « halluciner » des informations. Il a plaidé pour une éducation qui valorise les compétences distinctivement humaines comme la créativité, l’empathie et l’éthique.
Il s’agit dont selon lui d’envisager l’IA non pas comme un substitut à l’enseignement humain, mais comme un complément qui, utilisé judicieusement, peut libérer du temps pour des activités enrichissantes et stimulantes, favorisant ainsi un apprentissage plus personnalisé et significatif.
L’évaluation à l’ère de l’IA
Enfin, il a abordé la nécessité de repenser les méthodes d’évaluation traditionnelles pour mieux refléter les compétences humaines essentielles, en différenciant notamment les tâches que l’IA peut exécuter de celles qui nécessitent une réflexion humaine profonde.
Voici quelques pistes qu’il propose :
- L’IA peut réaliser facilement certaines tâches traditionnellement évaluées, ce qui nécessite d’adapter les évaluations pour privilégier les compétences humaines distinctives. Par exemple, si l’IA peut facilement rédiger une dissertation, il faut privilégier l’évaluation des processus de réflexion, de recherche et d’argumentation.
- Il faut se concentrer sur l’évaluation des processus d’apprentissage plutôt que sur les résultats finaux. Cela implique de tenir compte des étapes de réflexion, de recherche, de collaboration et de création, et non seulement du produit final.
- L’IA peut être un outil pour donner des rétroactions plus fréquentes et personnalisées aux apprenants. Cela permet d’améliorer l’apprentissage en fournissant des conseils et des suggestions adaptés aux besoins de chaque élève.
- Il faut user de prudence quant à l’utilisation de l’IA pour évaluer les productions des élèves. Les outils d’évaluation basés sur l’IA peuvent présenter des biais et ne pas refléter fidèlement la compréhension ou les compétences des élèves.
- L’évaluation doit tenir compte du contexte d’utilisation de l’IA dans l’établissement. Il faut définir des règles claires sur ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas, et adapter les méthodes d’évaluation en conséquence.
La conférence de Pascal Vangrunderbeeck a donc ouvert de nouvelles perspectives sur l’intégration de l’IA en éducation, soulignant l’importance d’une approche équilibrée qui valorise tant les capacités technologiques que les compétences humaines.On peut obtenir le support visuel de sa conférence juste ici.