Par France Legault, responsable de l’équipe de conseillers pédagogiques RÉCIT, Fédération des établissements d’enseignement privés (FEEP), Caroline Chaput, conseillère pédagogique RÉCIT à la FEEP, Emilie Duchesne, enseignante d’anglais langue seconde, École secondaire de Bromptonville
En anglais langue seconde, l’évaluation de la compétence 1, Interagir oralement, n’est pas toujours une tâche simple. Le grand nombre d’élèves dans une même classe, leur manque d’autonomie, la pauvreté du vocabulaire de certains ainsi que le désengagement et le manque de motivation des autres mobilisent l’attention de l’enseignant au détriment de l’évaluation réelle des élèves. Sortir les élèves en sous-groupes est une tâche fastidieuse qui demande beaucoup de temps et de ressources. Comment peut-on engager les élèves dans des tâches afin de se dégager du temps pour mieux les évaluer en classe?
Le jeu comme opportunité d’interaction
Établir une routine dans laquelle on intègre des périodes de jeu de société peut être une avenue intéressante à explorer. Tout comme pour d’autres tâches dans lesquelles les élèves seront amenés à interagir, l’enseignement explicite du vocabulaire et des comportements attendus en lien avec la situation de jeu est nécessaire. Des tableaux d’ancrage sur lesquels ces phrases et ces mots-clés sont inscrits peuvent être disponibles afin de soutenir les élèves plus jeunes. De plus, l’utilisation du contexte de jeu permet de proposer des tâches authentiques d’interaction entre les élèves, rendant ainsi les échanges plus signifiants. En plus de développer la compétence à interagir en anglais, ce contexte d’apprentissage permet aux élèves de réinvestir leur compréhension des consignes lorsque de nouveaux jeux sont présentés en classe.
La mise en place de périodes de jeu doit s’inscrire dans une démarche pédagogique bien expliquée à l’ensemble des acteurs de l’école : la direction, les pairs, les parents et les élèves eux-mêmes. Des intentions pédagogiques doivent être nommées ainsi que les critères d’évaluation.
Cette méthode permet de recueillir des traces du développement des compétences des élèves lorsqu’ils interagissent à l’oral. À la fin d’une étape, il sera possible d’observer l’ensemble des élèves. En combinant ces observations avec d’autres interactions orales, comme le travail d’équipe ou les discussions plus formelles documentées numériquement, il est possible d’obtenir un portfolio qui montre l’évolution de chaque élève.
Concrètement, pendant que les élèves jouent, les enseignants peuvent circuler et les évaluer en utilisant des grilles basées sur le Cadre d’évaluation. Ainsi, les élèves sont encouragés à échanger durant les jeux, à s’aider mutuellement avec le vocabulaire, et à s’impliquer dans une tâche attrayante pour plusieurs. Ensuite, les élèves peuvent s’autoévaluer et donner des retours à leurs camarades en utilisant les mêmes critères d’évaluation.
Le jeu pour susciter le plaisir d’apprendre
Le sujet de l’utilisation des jeux de société pour développer les compétences en interaction orale des élèves étant très spécifique, il existe peu de données de recherche à propos des retombées directes sur la réussite des élèves. Syakur (2020), dans sa revue de littérature, soulève toutefois les éléments suivants :
- Le processus de communication implique l’interaction entre la prise de parole et l’écoute, deux compétences qu’on doit développer lorsque les jeux de société sont utilisés.
- Le jeu de société peut être un élément qui stimule les élèves à prendre la parole.
- L’utilisation de jeux de société a des retombées positives sur la participation, la qualité des interventions et le niveau de confiance des élèves dans la prise de parole.
Les retombées du développement d’un sentiment positif face à l’apprentissage d’une nouvelle langue sur la motivation des élèves est aussi un sujet bien documenté. De plus, il n’est pas à négliger que la compétence 8 du Référentiel des compétences professionnelles enseignantes (MEQ, 2020) est de soutenir le plaisir d’apprendre. On y retrouve notamment des notions de situations d’apprentissage authentiques, près des intérêts des élèves et favorisant la collaboration et la participation.
À garder en tête :
- Les intentions pédagogiques de ces périodes doivent être bien communiquées aux collègues, aux parents et aux élèves eux-mêmes.
- Ces périodes doivent s’inscrire dans une routine et non pas être des moments de détente ou une période de récompense.
- La sélection des jeux de société doit favoriser les collaborations et les échanges entre les élèves.
- L’enseignement des comportements attendus et du vocabulaire doit être fait explicitement.
- De la rétroaction doit être donnée aux élèves à la suite de ces périodes.
- Susciter le plaisir d’apprendre, c’est aussi stimuler l’apprentissage.
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