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Les enseignants qui utilisent beaucoup de « feuilles volantes » et qui s’en tiennent aux manuels et cahiers d’activités papier sont ceux qui risquent de vivre le plus grand choc à la venue des aides technologiques en classe. En effet, ces médiums traditionnels ne sont pas très utiles pour les élèves qui utilisent des logiciels pour pallier leurs difficultés. À moins… de les numériser!
La reconnaissance optique de caractère (ROC), cette étape nécessaire à la lecture des textes à l’aide d’une synthèse vocale, n’est pourtant pas aisée. « Nous avons plusieurs textes pour lesquels nous n’avons pas la version numérique originale. Il faut le passer dans la photocopieuse et ensuite dans un logiciel. Sans retouches, c’est parfois illisible. Même avec un très bon logiciel, il faudrait passer beaucoup de temps pour les retravailler. Ça prend parfois moins de temps de le recopier, tout simplement », se désole Isabelle Goyette.
Planif et quincaillerie
La numérisation doit être planifiée. Quels textes doivent être distribués à la classe entière dans le cadre des situations d’apprentissage et d’évaluation choisies? Quels textes doivent être remis en version numérique aux élèves en difficulté? A-t-on une telle version sous la main? Doit-on investir du temps pour numériser et éditer ces textes? Au primaire, cette dernière question mérite d’être posée. Dans le cas de courtes consignes, de tableaux, de textes imagés, différentes astuces de gestion de classe, dont le travail en dyade, peuvent justifier le choix de ne pas numériser tous les documents.
Au secondaire, les textes sont souvent plus denses et leur compatibilité avec un logiciel de synthèse vocale est primordiale pour des élèves ayant des besoins particuliers. Cela ne signifie toutefois pas qu’on doive abandonner la copie imprimée pour n’utiliser que les outils technologiques dans les tâches complexes, pense l’orthopédagogue Maude Lymburner. « En lecture et en écriture, une copie papier permet d’annoter le texte. Il faut continuer à appliquer les stratégies mises de l’avant et encourager la réflexion. À la fin, l’élève utilise sa synthèse vocale au même titre qu’un autre élève relit sa copie ».
Différents dispositifs de numérisation sont disponibles sur le marché. De l’énorme photocopieur pour les pages complètes au petit crayon numériseur pour les courtes consignes, en passant par un numériseur que l’on dispose sur une table ou encore une barre que l’on fait glisser sur le papier, il y en a pour tous les gouts et toutes les bourses. D’après les expérimentations de Richard Ayotte, à la commission scolaire des Samares, la souris numériseur offre de bons compromis. « En donnant la même feuille de papier à tous les élèves d’une classe, l’élève en difficulté peut passer sa souris sur les consignes. Ça fait apparaitre la photo à l’écran. L’étape de conversion des pixels en mots se fait automatiquement et avec une bonne efficacité ». Cette technologie est abordable en plus de rendre l’élève autonome. Toutefois, elle convient moins bien pour des textes de plusieurs pages, les textes ayant une mise en page complexe ou provenant d’un livre relié.
Isabelle Goyette a bien en tête de tester une telle souris pour se faciliter la tâche. Dans son école, numériseur et imprimante ne sont pas dans son local, ce qui nécessite les va-et-vient multiples avec des clés USB. « Je m’en accommode et je numérise en dehors de mes heures de travail parce que cela rejoint des convictions profondes et que je ne peux pas concevoir de créer une situation injuste envers ces élèves », explique-t-elle.
Droits d’auteur : holà!
Enfin, même si la technologie permet de numériser les documents, elle ne soustrait pas les enseignants aux droits d’auteurs. À l’exception des élèves ayant une déficience perceptuelle, la Loi sur le droit d’auteur est claire : si la version numérisée est disponible sur le marché, il n’est pas permis de reproduire une œuvre pour la présenter visuellement à des fins pédagogiques. Si le manuel scolaire, le cahier d’activités ou le roman n’existe pas en version numérisée, il faut demander une autorisation de numérisation à Copibec pour chaque élève en difficulté. Cette demande de numérisation n’est pas nécessaire s’il s’agit de matériel sous licence libre, comme la licence Creative Commons.
SOMMAIRE DU DOSSIER :
Introduction
1. Connaître enfin le succès grâce à la technologie
2. Des TIC pour aider les élèves ayant des troubles d’apprentissage : une injustice pour les autres?
3. Technologies d’aide aux troubles d’apprentissage : le défi technopédagogique des enseignants
4. Numériser son matériel traditionnel : guide de survie
5. Déploiement d’aides technologiques : des changements à prévoir dans la classe
6. Technologies d’aide et évaluation ministérielle
Conclusion