Après toutes ces années, toutes ces réformes et tous ces débats sur l’éducation, me voici encore une fois en train de me réinventer! Après 32 ans dans l’enseignement, je redeviens une « jeune pousse ». La Fabrique Beaubois, c’est beaucoup plus qu’un Fablab ou un Makerspace.
C’est le moyen le plus brutal et le plus intéressant que je n’ai jamais eu pour me rapprocher et m’adapter à la nouvelle réalité des adolescents dans ma classe. Je ne veux plus leur enseigner uniquement « ma réalité » et les connaissances du monde dans lesquelles j’ai grandi et qui justifient ma manière d’être et de vivre. Je veux comprendre ce petit citoyen d’un monde qui m’échappe parfois et qui va plus vite que la lumière. Ce monde où les emplois deviennent de plus en plus virtuels. Ce monde en déconstruction qui fait disparaître peu à peu les anciens objets de mon quotidien. On ne reçoit plus les journaux, on n’écrit plus beaucoup de lettres, on écoute la musique virtuelle et on s’abonne à Netflix. Nos enfants ne sont plus attachés à la télévision comme nous l’étions et de ce fait, c’est moi qui dois aussi faire mon bout de chemin pour accompagner mes élèves dans ce parcours dont je ne connais pas la fin.
Changer, c’est difficile, surtout si l’on pense et évalue qu’on fait un bon travail et que tout fonctionne bien. Mais, ce n’est pas pour moi que je veux changer… c’est pour eux. C’est un changement de paradigme majeur en éducation. Je veux mettre l’élève au milieu de ses apprentissages dans un environnement qui le stimule, l’interroge, l’interpelle. Je veux que la pédagogie soit au cœur de la technologie et non le contraire. J’entends déjà toutes les craintes et tous les reproches avant même de commencer. À quoi ça sert, c’est juste des « bébelles », c’est juste pour les « geeks ». Les imprimantes 3D, les découpeuses lasers, les logiciels 3D, les fils électriques, les machines à coudre, le papier et les crayons sont autant d’outils technologiques dans la boîte à outils des jeunes.
La technologie doit permettre de mieux comprendre des concepts qui autrement seraient plus difficiles à saisir ou à réaliser. Fabriquer un moteur à impulsion magnétique en classe pour un jeune qui a de la difficulté en sciences peut devenir une source de motivation et un défi intéressant. C’est un prétexte incroyable pour faire acquérir nombre de connaissances et de concepts plutôt abstraits sans parler de l’estime de soi. Je veux des verbes d’action dans ma classe comme : analyser, comprendre, fabriquer, construire, explorer, cogiter, faire… FABRIQUER.
La Fabrique Beaubois doit être plus qu’un lieu, c’est une nouvelle façon de concevoir l’éducation tout en continuant de faire ce qu’on fait de mieux…
Michel Choquette
Enseignant en économie et en monde contemporain
Collège Beaubois, Pierrefonds
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Cet article fait partie du dossier « La mise en place d’un atelier de fabrication numérique (makerspace) », dont voici la liste des articles en ordre antéchronologique.