De plus en plus d’enseignants troquent le devoir classique sur papier pour celui sur ordinateur. Parfois, même l’agenda est offert en version numérique ou carrément relégué aux oubliettes, grâce aux plateformes mises à la disposition des enseignants par certaines commissions scolaires.
Les plateformes virtuelles
Édu-Groupe est un portail qui dessert depuis neuf ans une cinquantaine de commissions scolaires et huit écoles privées à travers le Québec. Cet outil permet la diffusion d’informations aux parents, aux élèves ainsi qu’à tout le personnel de l’organisation. L’enseignant peut y créer une communauté virtuelle pour sa classe, un espace de collaboration auquel les parents sont de plus en plus conviés. Offrir une plus grande place aux adultes dans le cheminement scolaire des jeunes est d’ailleurs un enjeu de première ligne, alors que des milliers de parents sont inscrits et suivent virtuellement le quotidien de leur enfant. Il y a même des communautés de parents d’une même classe qui se créent pour faciliter les échanges, la diffusion de l’information et le partage d’expériences diverses.
Les devoirs et travaux à réaliser sont diffusés sur ce portail, de même que des liens vers des sites de référence. L’enseignant peut même décider de créer un forum propre à son groupe, ce qui permet aux enfants d’échanger une fois à la maison et de s’entraider pour les devoirs. L’utilisation de cet outil par les enseignants est volontaire, mais plus de 20 % le feraient pour la présente année scolaire. Un nombre appelé à augmenter, avec l’omniprésence des technologies dans nos vies.
La Commission scolaire des Affluents utilise quant à elle le Bureau virtuel depuis le milieu des années 2000, et l’expérience est très concluante selon Éric Ladouceur, coordonnateur aux communications. Le BV, comme plusieurs le surnomment, est une forme de portail intranet dédié aux enseignants, aux élèves et à leurs parents. Chacun reçoit un code d’accès en début d’année. Les enseignants les plus férus en informatique y affichent les devoirs, mettent des liens vers les travaux à compléter, disposent des compléments d’information à la matière enseignée en classe et échangent directement avec les élèves. Les parents peuvent aussi avoir accès à une multitude d’informations sur leurs enfants par le biais du Bureau virtuel. Ils peuvent consulter les notes des travaux, les bulletins et échanger avec l’enseignant de leur enfant. C’est aussi une bonne façon de se tenir au courant de ce qui se passe en classe. « L’an dernier, nous avions 3000 parents d’inscrits », se réjouit M. Ladouceur. Sept commissions scolaires utilisent le Bureau virtuel.
D’autres gestionnaires de classe virtuels existent, notamment Plurilogic et Coba. Enfin, plusieurs écoles utilisent leur site Internet comme babillard pour informer les parents. Le calendrier mensuel des activités de l’école y figure, de même que la liste d’effets scolaires.
La richesse des logiciels gratuits
Il y a de multiples façons d’utiliser les nouvelles technologies dans l’enseignement et dans la réalisation des devoirs. Pierre Poulin, enseignant dans une iCl@sse de 6e année de l’école Wilfrid-Bastien de Montréal, dans l’arrondissement Saint-Léonard, vante les bienfaits de l’informatique pour l’apprentissage des enfants. Il réalise quotidiennement avec ses élèves un wiki de la classe. « Il s’agit d’un manuel scolaire que nous écrivons, mes élèves et moi. On le bonifie selon les trouvailles que chacun fait sur la toile. »
L’enseignant utilise également avec ses élèves des cahiers en ligne sur Evernote, une plateforme permettant un téléchargement maximum de 60 Mo par mois gratuitement (il y a des frais pour une utilisation plus importante). Ces derniers permettent aux jeunes d’agrémenter le texte d’images et d’icônes pertinentes, selon leur bon vouloir. « Chacun peut modeler son cahier à sa façon », affirme M. Poulin.
Pour la réalisation de travaux et de devoirs collectifs, Pierre Poulin s’en remet à Google Docs, qui permet à plusieurs utilisateurs de travailler simultanément sur un même document, peu importe où ils se trouvent. « Les parents sont heureux de ne plus avoir à transporter les enfants pour qu’ils réalisent leurs travaux d’équipe. » Autre grand avantage de ces outils en ligne : l’élimination de la fameuse clé USB, si facilement oubliée ou égarée avec l’entièreté des travaux scolaires à l’intérieur. Notons toutefois que ces services « gratuits » se paient par de la publicité et que la vie privée des usagers peut être compromise.
L’enseignant déplore cependant que certains établissements d’enseignement empêchent les étudiants de se servir de ces outils pour éviter les débordements. « Les écoles ne pourront pas résister longtemps », espère-t-il, tout en reconnaissant que le changement, dans le vaste monde de l’éducation, est parfois lent à se concrétiser.
L’an dernier, deux enseignantes de l’école primaire de l’Escale et du Plateau, de la Commission scolaire des Premières-Seigneuries, à Québec, ont tenté l’expérience des devoirs technos. Toutes les deux semaines, les parents recevaient un courriel avec le menu des devoirs à réaliser et les travaux devaient se faire à l’écran, sauf ceux de mathématiques, et être ramenés imprimés en classe ou sur une clé USB. L’expérience fut concluante, et le projet se poursuit cette année. « C’est stimulant, surtout chez certains garçons. Souvent, ils demandent à leurs pères de les aider dans leurs devoirs », souligne Annie Fournier, directrice de l’école, heureuse de pouvoir contribuer à la création de liens familiaux plus forts.
Mais qu’arrive-t-il si un enfant fréquentant une classe technologique n’a pas l’équipement nécessaire à la maison pour réaliser ses devoirs? « Alors, il travaille dans un cahier de notes, mais a du temps pour mettre à jour ses documents pendant la classe. Il peut échanger avec les autres les connaissances importantes et a accès à un ordinateur en priorité », assure l’enseignant Pierre Poulin, en précisant qu’en trois ans de iCl@sse, il ne lui est jamais arrivé de croiser un enfant dépourvu d’ordinateur à la maison. Dans certains milieux, la situation pourrait toutefois être bien différence.
Dans le cas de parents complètement dépassés par la technologie, M. Poulin ne s’en inquiète pas outre mesure. « Les parents ont rarement à aider. C’est le contraire! L’élève transcrit ses notes de cours ou exercices du jour sur Internet, sur le wiki par exemple, et participe en ligne à un échange avec les autres élèves. Ils s’entraident entre eux de la maison. Le plus souvent, les parents découvrent les outils en ligne et ce sont les enfants qui leur apprennent. »
Dans la classe de Marie-France Fortin, enseignante à l’école secondaire Lucille-Teasdale, l’iPad est utilisé tant à l’école que pour les devoirs. En effet, bien qu’il soit la propriété de l’école, les élèves peuvent l’apporter à la maison pour travailler. Cette tablette numérique leur permet notamment d’enregistrer un cours et de mettre leurs notes par écrit une fois le soir venu. Il n’y a aucuns frais pour les parents. Tous n’ont pas cette chance. Et certaines écoles privées, comme le Collège François-de-Laval et le Collège St-Jean-Vianney commencent à rendre obligatoire la possession d’iPad ou d’ordinateurs portables aux frais des parents.