ANNONCE

Un dossier réalisé conjointement par l’École branchée et Carrefour éducation.

Un dossier destiné aux directions d’écoles, qui propose des pistes pour établir un cadre de travail cohérent pour les enseignants comme pour les élèves, en tenant compte des attentes formulées par la société et des aspirations des jeunes.

Depuis tout près d’une décennie, la pression est forte sur les enseignants afin qu’ils actualisent leurs approches pédagogiques. En outre, il leur est demandé de différencier leurs approches auprès des élèves, d’intégrer les technologies, de voir à leur développement professionnel de façon continue, etc. Or, ne faudrait-il pas que les structures organisationnelles de l’école leur fournissent le terreau fertile pour s’exercer? C’est exactement la raison pour laquelle la direction d’école a un rôle primordial à jouer dans l’école : permettre aux autres professionnels de l’éducation qui travaillent le plus près des élèves de s’épanouir, mais aussi de voir au développement des compétences du 21e siècle chez ces derniers.

Pour ce faire, les directions doivent implanter un cadre de travail cohérent pour ces professionnels, mais aussi pour les élèves. Ce cadre doit aussi tenir compte des attentes formulées par la société ainsi que les aspirations de nos jeunes apprenants.

C’est ce que nous vous proposons de réfléchir dans le cadre d’un dossier destiné aux directions d’établissement : comment diriger une école au 21e siècle? Il permettra d’identifier des pratiques qui s’avèrent incontournables pour contribuer à la résolution des problématiques qui émergent en ce siècle et faire en sorte, ultimement, que les élèves puissent faire de même et ainsi développer les outils nécessaires pour s’épanouir et actualiser leur potentiel.

Table des matières 

L’art subtil d’être inutile
La mentalité de croissance… pour les professionnels
L’éloge de la complexité comme antidote à la routine
En finir avec l’impression du temps qui passe trop vite
Une formation initialement continue
Ces tribus que nous menons
Les archétypes du leadership
Le leadership transformationnel
La conclusion


L’art subtil d’être inutile

On jase : et si devenir inutile était la meilleure chose qu’un leader scolaire puisse faire? Première partie de notre dossier destiné aux directions d’établissements scolaires.

S’il y a une chose qui inspire tous les acteurs du monde de l’éducation, c’est certainement le sentiment d’être utile à quelque chose, à quelqu’un. Effectivement, qu’y a-t-il de plus noble que de contribuer à préparer un jeune pour sa vie future? Y a-t-il plus gratifiant que se sentir utile dans cette grande épopée qui consiste à éduquer un humain? Et pour les directions d’établissements, le sentiment d’être utile aux membres du personnel de l’école compte tout autant.

Or, en y pensant bien, le succès réside en son contraire : comment, en tant que direction d’école (ou à titre d’enseignant), puis-je être « inutile »? Drôle de question direz-vous? Explorons-en les fondements!

Souvent, la mentalité de gestion veut que tout soit approuvé ou vu par la direction concernée avant que les projets soient menés à terme. Et c’est vrai dans presque tous les champs d’activités, allant de l’école à l’entreprise en passant par les services publics. Bien évidemment, il est question d’imputabilité et le leader a l’obligation de superviser les projets sous sa responsabilité. Pourtant, au-delà de ces impératifs incontournables, tant de personnes cherchent à faire de leur fonction un incontournable au succès d’un projet. Est-ce là une façon de justifier leur utilité auprès de l’entreprise? Possiblement. Quoiqu’il en soit, pour les leaders de ces organisations, il est possible de voir les choses autrement.

Et c’est ici que « devenir inutile » est à envisager. Vous avez bien lu! Pour ma part, je cherche à faire en sorte que mes collègues puissent se passer de moi. Difficile à croire? Dans les faits, cela me permet de servir mon école autrement que par le service que je lui rends habituellement. Bref, je cherche à sortir hors de ma fameuse description de tâche qui, pour moi, représente le strict minimum des choses que je dois faire (et non le maximum). Cela me permet d’imaginer autre chose pour notre école et de continuer à explorer pour la faire avancer vers des endroits où peu d’écoles s’aventurent. Cela me permet de faire une veille et de surveiller ce qui se passe dans le monde scolaire canadien, américain, européen, ainsi que dans notre propre réseau.

Mon but est de rendre les personnes autour de moi autonomes. Je veux qu’elles aient les coudées franches dans les décisions qu’elles ont à prendre et qu’elles connaissent la direction qui leur est donnée. Je veux également qu’elles sachent ce que je fais comme travail et qu’elles connaissent les réponses aux questions qui me sont fréquemment posées. De cette façon, la nécessité de me consulter diminue. C’est un peu la base du leadership transformationnel, un concept qui s’appuie davantage sur la confiance envers son équipe de travail plutôt qu’en sa capacité à se multiplier et à accomplir d’innombrables tâches.

Je ne cherche donc pas à faire de mes fonctions une chasse gardée. Bien au contraire, sachant que personne n’est irremplaçable dans sa vie professionnelle, il est dans le meilleur intérêt de notre école que j’ouvre le grand livre de mes fonctions, ce qui contribuera à rendre mes collègues (et même les élèves et leurs parents) autonomes en ce qui concerne leurs recours à mes services.

Évidemment, au-delà de la responsabilisation des personnes qui sont sous notre autorité, il y a tout l’aspect touchant à la formation des membres de ces équipes de travail. Le mentorat, les activités de développement professionnel et la bonne circulation de l’information apparaissent comme incontournables.

C’est au moment où les choses se font presque d’elles-mêmes que nous devenons réellement utiles. Bref, c’est lorsque nous réussissons à « ne servir à rien » que notre utilité est à son apogée! Et cet espace nouvellement créé contribue sans contredit à guider notre école à travers les défis posés par le 21e siècle et de voir à ce qu’elle prospère, et ce, pour le bénéfice des élèves et en respect du projet éducatif.

Des exemples de dossiers souvent mis de côté, faute de temps

  1. Revamper des documents et les actualiser pour qu’ils reflètent les nouvelles préoccupations de la clientèle scolaire : règles de vie, politique locale d’évaluation, procédures, etc.;
  2. Animer des comités, particulièrement ceux qui sont à vocation pédagogique;
  3. Assumer un leadership et une certaine animation pédagogique;
  4. Exercer une veille pédagogique et numérique : qu’est-ce qui se fait ailleurs? Quelles sont les conclusions de la recherche universitaire qui sont pertinentes pour mon équipe et pour moi?
  5. Accompagner les enseignants dans leur développement professionnel;
  6. S’asseoir et jaser avec les élèves;
  7. Prendre le temps d’échanger avec les parents sur une base régulière;
  8. Voir à son propre développement professionnel;
  9. Etc.

Alain Beaudot écrivait, dès 1969 (p. 52), que « la pédagogie consiste à faire en sorte que celui sur lequel elle s’exerce finisse par se passer de celui qui l’exerce ». C’est la nécessité de faire en sorte qu’on ne devienne plus incontournable. Probablement dans un élan de valorisation professionnelle, les enseignants tiennent à faire perdurer leur lien d’utilité avec les élèves alors qu’ils doivent œuvrer à les rendre autonomes au sens où, par exemple, ces derniers doivent s’engager dans leur démarche d’apprentissage, qu’ils mènent leur propre processus de recherche, qu’ils s’impliquent dans le transfert des connaissances, etc. Cela est vrai pour les élèves vis-à-vis leur enseignant, cela l’est également pour les professionnels qui sont à pied d’oeuvre dans l’école et qui travaillent en collégialité avec la direction.

Soyez « inutiles » et contribuez à faire avancer votre école. Tel est votre défi de cette année scolaire. Après tout, pour paraphraser Tina Fey, comédienne bien connue aux États-Unis, le principe est simple : embaucher les bonnes personnes et leur donner tout l’espace nécessaire pour qu’elles puissent faire ce pourquoi elles ont été embauchées!

Référence :

– Beaudot, A. (1969). La créativité à l’école. Paris : Presses universitaires de France.

 


La mentalité de croissance… pour les professionnels

La psychologue de renom et professeure à l’Université de Stanford, Carol Dweck, considère que les compétences personnelles et professionnelles doivent être perçues comme étant dynamiques et constamment à parfaire. C’est un concept mieux connu sous le nom de « mentalité de croissance ». Une mentalité est une préconception que l’on a de soi-même (consciente ou non) et qui concerne qui nous sommes et ce que nous pouvons accomplir, et ce, autant au niveau professionnel que personnel. Dweck prétend que cette mentalité influe sur notre capacité d’apprendre et de développer des compétences, d’entrer en relation avec autrui et d’atteindre un certain niveau de succès professionnel. La mentalité de croissance, aussi appelée « état d’esprit de croissance » par l’auteure de la théorie, est donc la croyance que n’importe quelle aptitude personnelle peut être développée grâce à une bonne éthique de travail, une certaine résilience et, surtout, une prédisposition à apprendre tout au long de la vie.

À son opposé se trouve la mentalité fixe, celle où des gens pensent que leurs qualités, leurs talents et leur intelligence sont prédéterminés et limités et qu’ils ne peuvent pas évoluer. Autrement dit, si on rapporte cela au plan scolaire, les recherches de la psychologue indiquent que les élèves comme leurs enseignants entretiennent la perception qu’il existe des gens « qui l’ont ou qui ne l’ont pas », et que rien ne peut changer cela.

Un exemple de mentalité fixe en éducation serait un enseignant qui expliquerait l’échec d’un élève par sa progression scolaire antérieure : « Stéphane a toujours eu de la difficulté en mathématique. Il était en échec en 1re et 2e secondaire. C’est logique qu’il le soit en 3e aussi ».

Bref, en éducation, tous les élèves peuvent réussir et l’intelligence ne suffit pas pour déterminer qui réussit ou échoue dans un cours. La motivation entre en ligne de compte, ainsi que l’éthique de travail et plusieurs autres paramètres.

« (…) de plus en plus de travaux de recherche (Dweck, 2010; Duckworth, Matthews, Kelly et Peterson, 2007; Tough, 2014) montrent que des compétences non scolaires du domaine intra personnel comprennent des attitudes comme la persévérance, le courage, la ténacité et une mentalité de croissance, sont étroitement liées à la capacité d’un être humain de surmonter des difficultés et de réussir à long terme. »

– Ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2016, p.14

Dans le même sens :

« D’après les chercheurs et les leaders du domaine de l’éducation, la métacognition et une mentalité de croissance (y compris l’autorégulation et la conscience éthique et affective), quoique toujours importantes, le sont encore beaucoup plus dans un environnement connecté et global qui suppose de savoir communiquer, travailler et apprendre avec divers groupes et équipes dans le monde entier. »

– Ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2016, p.16

…et pour l’enseignant?

Il n’y a donc pas de prédéterminisme ni de génétisme liés à la réussite. C’est la question de mentalité et l’importance du savoir-être (mieux connu sous l’anglicisme « soft skills ») qui est incontournable. Le professionnel de l’éducation, qu’il soit enseignant ou directeur, se doit d’adhérer à cette vision s’il veut à son tour l’inculquer aux élèves.

D’un point de vue professionnel en éducation, l’enseignant doit lui-même adopter une posture d’apprenant pour parfaire ses connaissances et des compétences professionnelles dans le but de faire évoluer sa propre pratique et, par le fait même, sa profession entière. Cela permettra, indirectement, de contribuer positivement à la démarche d’apprentissage des élèves placés sous sa responsabilité.

S’il est un domaine qui nécessite une constante actualisation des pratiques professionnelles au 21e siècle, c’est bien celui de l’éducation. Les percées scientifiques sont désormais accessibles à tous, incluant les parents, et il faut qu’elles soient mises en pratique rapidement pour assurer la réussite du plus grand nombre d’élèves.

…et pour la direction?

La mentalité de croissance est particulièrement importante puisqu’elle permet, à la direction comme pour tout le monde, de veiller à l’actualisation des connaissance et des pratiques. Le contraire peut être dangereux : une mentalité fixe mènerait à une stagnation des connaissances et des compétences pour éventuellement mener à un décalage des connaissances et des pratiques. Cela a un impact direct sur la progression de l’école au grand complet : désuétude des politiques, de la mission, du projet éducatif, etc.

L’école est par définition une organisation apprenante, laquelle se renouvelle sans cesse. Pour cela, il faut que chacun de ses intervenants soit disposé à apprendre des autres, mais aussi, qu’il soit engagé dans une démarche de formation continue.

Benjamin Barber, un éminent sociologue américain, a dit ceci en 1992 : « Je ne divise pas le monde entre les faibles et forts, ou entre les succès et les échecs. Je divise le monde entre les apprenants et les non-apprenants ».

Références 

– Barber, B. (1992). Benjamin Barber. The Reader’s digest. 140(837-842).
– Dweck, C. S. (2006). Mindset: The New Psychology of Success. New York: Random House.
– Ministère de l’Éducation de l’Ontario. (2016). Définir les compétences du 21e siècle pour l’Ontario. Compétences du 21e siècle. Document de réflexion. En ligne.


L’éloge de la complexité comme antidote à la routine

L’école occidentale du 21e siècle est certainement un endroit où s’entrechoquent les autonomies professionnelles. On pense principalement aux frictions possibles entre les enseignants et les membres de la direction. Mais de plus en plus, d’autres autonomies s’invitent dans le paysage scolaire : celle des parents, celle des professionnels de la santé, celles issues du milieu juridique, etc. Ces derniers ajoutent leur expertise et contribuent à expliquer plusieurs dimensions parallèles qui gravitent autour de la démarche d’apprentissage de l’élève : santé mentale, divorce des parents, démotivation, intimidation, etc. Bref, la relation éducative en milieu scolaire se complexifie et ce choc des autonomies professionnelles traduit bien cette réalité.

Bien qu’il soit difficile d’accepter que des orientations ou des considérations soient imposées par quelqu’un issu de l’extérieur du milieu scolaire, ce qui importe, c’est de comprendre que la complexité des jugements, gestes et décisions n’ont d’égal que la complexité des jeunes placés sous la responsabilité de l’école. Cette complexité est à apprivoiser. Aujourd’hui, plus que jamais, l’éducation reconnaît et valorise la diversité en tant qu’outil de développement de l’individualité chez l’élève et même, d’émancipation.

Découragé? C’est normal!

Peter Senge, dans sa « Cinquième discipline », nous rappelle avec sagesse qu’il faut être patient et que les changements de culture s’effectuent en profondeur et non en surface. Ils prennent du temps non seulement à s’opérer, mais surtout à montrer les résultats. Pour citer un ancien prix Nobel de littérature, l’écrivain dissident russe Alexandre Soljénitsyne, « la nature humaine, si elle évolue, ce n’est guère plus vite que le profil géologique de la Terre ».

Vous êtes parfois découragé? Vous avez le sentiment que cette complexité tarde à être reconnue dans votre milieu? Justement, « la pensée systémique se veut un antidote à ces réactions de découragement (Senge, 2016, p. 72) » qui surgissent quand on accorde trop d’attention à des éléments isolés et non aux interrelations dynamiques du système en mouvance.

Ces détails qui mènent nos activités professionnelles

Et ces éléments isolés, on leur accorde beaucoup (trop?) d’importance. Le problème est que ces éléments sont en fait des symptômes d’une intense activité systémique de fond qui demeure invisible à l’oeil et ils sont à la base d’une bonne partie de notre activité professionnelle quotidienne.

En éducation, la routine est bien implantée : on enseigne la même chose au même moment à chaque année, et ce, malgré que nos élèves changent d’une année à une autre et que les besoins se diversifient. Cette diversification, catalysée par la reconnaissance de l’importance de la différenciation pédagogique, implique qu’il faille souvent recommencer d’une année à l’autre et faire évoluer nos approches pédagogiques en fonction des élèves présents dans nos classes.

Il n’existe pas de solution identique pour toutes les problématiques et, bien souvent, ces problématiques sont des défis qui s’échelonnent, pour un enseignant (ou un directeur), sur une année scolaire complète, et parfois plus. De plus, cette routine est en fait une copie de ce que nous faisions l’an dernier à pareille date, ce qui implique qu’on ne reproduit pas seulement les bons coups, mais également les problèmes. Dans un système, selon Senge (2016), les problèmes proviennent souvent de « solutions déjà apportées dans le passé » (p. 61). Voilà une raison qui explique l’intérêt croissant pour le développement des compétences du 21e siècle à développer chez les élèves et aussi chez les professionnels qui les encadrent. Il est illogique de prétendre qu’un système scolaire dont plusieurs attributs remontent au 17e siècle (Gauthier, Bissonnette et Richard, 2013, p. 35), sont toujours considérés comme étant des solutions valides pour des jeunes nés près d’un demi-millénaire plus tard.

Enfin, lorsqu’on parle de système, il ne faut pas oublier que nous en faisons tous partie et qu’il est lui-même formé de dizaines de systèmes dont les composantes sont variables et pas nécessairement présentes dans l’enceinte de la classe. Cela inclut les collègues, mais aussi les parents et d’autres intervenants.

Références

– Gauthier, C., Bissonnette, S., Richard, M. (2013). Enseignement explicite et réussite des élèves : la gestion des apprentissages. Saint-Laurent : ERPI.
– Senge, P. (2016). La cinquième discipline : l’innovation collective dans les organisations apprenantes. Paris: Eyrolles.


En finir avec l’impression du temps qui passe trop vite

Ce réflexe humain bien ancré au 21e siècle, celui de l’instantanéité, est possiblement augmenté par l’avènement des technologies numériques dans nos vies, alors que les problématiques qui en découlent, elles, partiellement pour les mêmes raisons, se complexifient. Effectivement, certains observateurs estiment que la technologie encourage l’instantanéité et exacerbe les problématiques déjà présentes en éducation. Heureusement, comme Peter Senge l’écrit, « C’est en partie une conséquence de la technologie et de l’émergence des nouveaux grands réseaux d’information et de communication qui nous permettent de penser et d’agir avec une plus grande “conscience des écosystèmes” ». La technologie serait donc à la fois le problème et une bonne partie de la solution.

Du réflexe de l’expérience au réflexe dans l’action

Au-delà de la technologie, de l’instantanéité, il y a le sentiment d’urgence où les professionnels de l’éducation se laissent envahir par le tourbillon de diverses situations pour ainsi cocher, en toute hâte, leur liste de choses à faire ou encore, pour régler l’imprévu qui monopolise l’organisation du temps. C’est un peu comme si tous perdaient le contrôle du temps et de ce qui y surgit pendant le quotidien. Nous ne nous accordons que de rares pauses pour méditer sur nos décisions professionnelles passées alors que les dix mois de l’année scolaire défilent à toute allure. Senge (2016) nous rappelle qu’il faut prendre le temps de réfléchir à notre pratique en engageant des « conversations réflexives » (p. XIX).

D’ailleurs, si nous souhaitons que les enseignants prennent le temps de réfléchir et de dialoguer à cet égard, il faut certainement que leurs directeurs puissent prendre le temps de le faire. Cette réflexion, dialoguée ou non, permet de développer un réflexe dans l’action afin que l’intelligence précède la conscience, c’est-à-dire que le réflexe professionnel permette d’agir de façon réfléchie dans le feu de l’action d’une situation problématique donnée. Cela permet de dépasser le « premier degré », celui de l’expérience. Apprendre par et dans l’action ou régler un problème de façon efficace pour le situer dans un cadre d’apprentissage de « second degré » sollicite une démarche d’analyse située dans un cadre mental.

Bref, le réflexe de l’expérience en éducation ne suffit plus à faire des professionnels conscients de la complexité dans laquelle ils évoluent avec leurs élèves. Si la démarche réflexive et la métacognition sont des éléments-clés pour les élèves, il en va de même pour les professionnels qui les encadrent dans cette aventure scolaire.

Le rôle de la direction

Le rôle de la direction est de mettre en place des mécanismes permettant le développement de la pensée réflexive. Cela peut se faire de diverses façons dans le cadre d’un accompagnement pédagogique par la direction ou par les pairs. Il s’agit de permettre à l’enseignant de verbaliser les raisons pour lesquelles il a pris une décision ou exercé son jugement dans le cadre du pilotage d’une activité pédagogique ayant fait l’objet d’une observation. Par exemple, on voit naître des « educational rounds » ou des « instructional rounds » dans certaines écoles américaines; ce sont des pratiques importées de la médecine où des enseignants se rassemblent, en petits groupes, pour résoudre une problématique qui leur est commune. Dans cet exemple précis, la direction pourrait agir sur la structure organisationnelle de l’école et ainsi faire en sorte que ces rassemblements d’enseignants puissent avoir lieu.

Également, l’organisation d’activités de formation continue s’avère une excellente façon de permettre à tous les membres du personnel de s’arrêter et de réfléchir sur leur pratique en apprenant davantage de leurs collègues ou des recherches menées par des universitaires. Une fois de plus, il appartient à la direction de faire en sorte que le cadre organisationnel scolaire puisse être flexible afin de créer ces occasions.

Senge (2016) appelle cela « les capacités d’apprenance essentielles d’une équipe » (p. XIX), lesquelles s’expliquent par la clarification des aspirations, l’engagement de conversations réflexives et la compréhension de la complexité. La complexité en éducation est donc un prétexte en or qui permet aux professionnels de se dépasser et d’évoluer dans un système dynamique qui est constamment en mouvement.

Référence

– Senge, P. (2016). La cinquième discipline : l’innovation collective dans les organisations apprenantes. Paris: Eyrolles.


Une formation initialement continue

Une des principales particularités de la direction d’une école (au Québec, à tout le moins) est que la formation initiale « conventionnelle » de premier cycle n’existe tout simplement pas. La majorité du personnel de direction a d’abord été formée comme enseignant puisqu’un baccalauréat en administration scolaire ou en gestion de l’éducation n’existe pas. Ceux qui font le saut dans cette profession l’apprennent essentiellement de trois façons :

  1. grâce à une formation de deuxième cycle universitaire;
  2. grâce à diverses activités de formation continue moins formelles;
  3. grâce au soutien de mentors ou d’une « tribu » (voir chapitre suivant).

Un peu comme c’est le cas pour les enseignants, la formation continue est incontournable pour la direction d’école si cette dernière souhaite ancrer ses pratiques professionnelles dans le siècle actuel et les adapter aux besoins des élèves, des parents et des enseignants.

En un sens, on fait le saut en direction grâce à la formation continue. On part de la combinaison du bagage d’expérience et de la formation d’enseignant pour y ajouter une formation qui est, en fait, une formation initiale de direction, laquelle est offerte  au deuxième cycle par des universités.

Cette formation universitaire est cependant insuffisante : il est essentiel de poursuivre sa démarche de formation grâce à des activités informelles qui relèvent de la veille administrative, pédagogique et pédagonumérique. Il est donc incontournable de lire des livres spécialisés, de participer à des communautés d’apprentissage, de prendre part à des congrès ou autres types de formations, etc. Cela permet non seulement de demeurer à jour dans les domaines légaux, psychologiques, sociologiques, pédagogiques et autres, mais aussi de prendre des positions d’avant-garde qui permettront de mieux situer son école face aux défis qui se pointent à l’horizon.

De plus, il est important que cette veille ne s’effectue pas seulement au plan local ou régional. Une veille nationale nous permet de mieux comprendre les défis des autres provinces, comme l’Alberta et l’Ontario, et de voir comment elles s’y prennent pour les relever. Il en va de même pour l’international. Que se passe-t-il sur la scène scolaire aux États-Unis? Ailleurs dans la francophonie? Dans les pays dont les systèmes scolaires sont bien en vue comme la Finlande, la Nouvelle-Zélande, Singapour et la Corée du Sud? Garder un œil sur les systèmes d’éducation les plus performants au monde permet d’offrir les meilleures occasions de croissance pour nos écoles.

Ce qui importe est simple : la profession de direction d’établissement scolaire doit faire l’objet d’un renouvellement perpétuel. Cela permet d’explorer de nouveaux horizons et de construire une école différente, exceptionnelle et unique.


Ces tribus que nous menons

Le leadership a quelque chose de complexe et de mystérieux à la fois que les chercheurs de toutes les disciplines peinent à expliquer scientifiquement. Il existe certainement un magnétisme qui s’exerce par les uns sur les autres, lequel est souvent explicable par des traits de personnalité. Cette optique pour le moins subjective explique que les leaders ne font jamais l’unanimité. Cette tendance naturelle à être attiré vers les leaders n’est pas universelle et elle diffère entre les individus. Par exemple, Elon Musk (Tesla) est souvent cité comme étant un leader hors pair, alors que certains ne le suivront jamais. Steve Jobs (Apple), reconnu comme étant l’un des plus grands leaders des trente dernières années, ne faisait pas l’unanimité non plus : alors que les uns l’admiraient, les autres dénonçaient son style de gestion autocratique et impitoyable.

Cela s’expliquerait par le besoin que l’individu éprouve à vouloir croire en quelqu’un et être affilié à un mouvement, à un groupe. L’humain ne peut résister à ce besoin d’appartenir à quelque chose de plus grand que soi. Cela expliquerait les mouvements politiques, religieux, civiques, etc.

Quoiqu’il en soit, tous les humains sont attirés par des leaders et chacun de ces leaders rassemble des gens autour de lui. Seth Godin appelle ces rassemblements des « tribus ». Autrement dit, d’innombrables tribus existent : là où il y a un leader, il y a une tribu. Ces tribus tissent une toile complexe et profonde :

– elles peuvent être constituées de plusieurs leaders;
– les leaders peuvent mener plusieurs tribus;
– on peut suivre plusieurs leaders à la fois;
– suivant un cycle naturel, des tribus se font, d’autres se défont.

Au-delà de la complexité de la toile, une chose fort simple demeure : il ne peut y avoir de tribu sans leader et un leader n’existe pas sans sa tribu.

Le pouvoir est aux « suiveurs »

Alors qu’on serait tenté de croire que les « suiveurs » sont obnubilés par le rayonnement de leur leader, ce sont plutôt eux qui créent le mouvement. Ce sont eux qui font le leader. Ce sont ceux qui acceptent de suivre quelqu’un ou quelque chose qui lui donnent la légitimité de mener la tribu.

Les leaders ont toujours été ceux que nous avons suivis pour leurs idées novatrices. Ainsi, devenir un leader nécessite une bonne dose de courage. Cependant, être parmi les premiers à suivre un leader est un acte encore plus signifiant. En effet, les premiers leaders d’une cause ou d’une idée passent souvent pour hurluberlus, alors que les « suiveurs » sont ceux qui finissent par donner forme à la tribu. Voilà pourquoi il ne faut pas sous-estimer le pouvoir des « suiveurs ». S’ils donnent un sens à l’oeuvre du leader, ils peuvent aussi faire le contraire et miner sa démarche en lui retirant leur soutien.

Comment mener sa tribu?

Une question s’avère essentielle lorsqu’on transpose le tout au milieu scolaire : « en tant que leader pédagogique, comment menez-vous votre tribu »? Parmi les innombrables facteurs, il y en a trois qui sont particulièrement importants.

Dans un premier temps, les membres d’un « tribu » d’école sont non seulement des collègues de travail, mais aussi des élèves et des parents. Ils doivent faire confiance au personnel de direction et accepter d’apprendre de ce dernier. Le leader doit assumer son rôle de façon bienveillante en ayant l’intérêt de chacun à coeur. Cependant, comme le cite Dan Rockwell (2016), auteur, consultant et coach autoproclamé en leadership, « Good intentions don’t compensate for lousy leadership ». Le leadership est un accélérateur comme il peut être un frein important puisque les caractéristiques en question peuvent aussi bien servir le leader positif que le leader négatif. Cela est une excellente observation qui lève le voile sur un élément de plus à considérer dans une définition du leadership en milieu scolaire : nous souhaitons qu’il soit positif.

De plus, vu le pouvoir des « suiveurs », le leader doit trouver des façons de rejoindre ces derniers à travers divers canaux de communication efficaces. Bien évidemment, l’éducation étant une aventure fondamentalement humaine, cette communication passe par une présence constante et des échanges in situ, sur le terrain.

Enfin, il faut demeurer pertinent. Quelles idées avez-vous et surtout, comment savez-vous les mettre en application? Il est de la responsabilité de la direction de déranger la quiétude du milieu professionnel. En effet, un mouvement et une direction novatrice ne peuvent se faire sans déranger l’entourage immédiat.

En bref, le leadership n’est pas une question de « position » ou de poste dans une école, mais bien une question d’influence sur les autres.

Références

– Godin, S. (2008). Tribes : we need you to lead us. New York, Portfolio.
https://www.ted.com/talks/seth_godin_on_the_tribes_we_lead?language=fr#t-765600
https://www.youtube.com/watch?v=fW8amMCVAJQ
– Rockwell, D. (2016). Good intentions don’t compensate for lousy leadership. Récupéré le 9 mai 2016 de https://twitter.com/Leadershipfreak/status/729645870107385856


Les archétypes du leadership

Comme il fut précisé dans le texte précédent, le leadership est un concept complexe. Cela fait qu’il est extrêmement difficile de le définir de façon uniforme. Il existerait entre 180 et 350 définitions du leadership, selon les auteurs. Chacune de ces définitions se rapporte au contexte dans lequel il prend forme et cela illustre combien, par exemple, l’aspect artistique est aussi important que l’aspect scientifique. Ce qui importe, c’est d’outrepasser le simple aspect anecdotique parfois retrouvé dans les premières manifestations de l’étude du phénomène de leadership : la théorie des grands hommes et l’approche par les traits de personnalité. La première se rapporte à la croyance que des personnes naissent avec des qualités qui changeront le cours de l’histoire. C’est, en quelque sorte, une question de déterminisme biologique. La seconde, quant à elle, est fondée sur les traits de personnalité des humains qui, grâce à ceux-ci, les distinguent des prétendus « suiveurs ». Aujourd’hui, les recherches nous permettent de conclure que le leadership est un phénomène social qui dépasse largement la personne du leader.

Aussi, on ne peut nier l’importance du savoir-être dans la question du leadership. Deux individus qui disent la même chose, qui font la même chose dans le même contexte, n’arrivent pas nécessairement au même résultat.

On ne peut prétendre non plus que le flair, le charisme et l’entregent sont suffisants pour soutenir l’émergence d’un leadership en milieu scolaire. On a donc besoin de plus que des caractéristiques personnelles ou des comportements socialement acceptés pour espérer exercer un leadership durable auprès des intervenants d’une école.

À défaut de connaître les fondements universels du leadership ou d’être en mesure de définir le concept précisément, plusieurs se lancent dans les exercices taxonomiques. Celui de Peter Fuda (2016) s’appuie sur Manfred Kets de Vries (2013), de l’Institut européen d’administration des affaires, lequel distingue huit archétypes qui sont en fait des rôles joués par les leaders :

  1. Le stratège, celui qui aborde le leadership de façon stratégique grâce à une faculté d’analyse et de vision inscrites dans un intervalle de temps;
  2. L’agent de changement, celui qui profite de sa position pour amorcer une réforme ou un repositionnement quelconque;
  3. Le courtier, celui qui aime négocier des ententes;
  4. L’innovateur, celui qui profite de situations complexes pour élaborer des projets lumineux;
  5. L’entrepreneur, celui qui se sert de divers défis pour mettre en valeur l’entreprise, ses employés ou les idées générées;
  6. Le processeur, celui qui voit à accomplir des tâches prescrites dans un système bien huilé;
  7. Le coach, celui qui sait faire ressortir le meilleur de chacun des employés grâce à la qualité de la relation les unissant;
  8. Le communicateur, celui qui sait distribuer l’information nécessaire pour permettre l’accomplissement de tâches en douceur.

En y réfléchissant bien, ces catégories pourraient laisser croire que les leaders doivent se cantonner dans l’un ou l’autre de ces rôles, alors que c’est le contraire : un leader peut jouer certains de ces rôles, sans toutefois tous les jouer. Également, il peut jouer d’autres rôles qui ne se retrouvent pas dans l’exercice taxonomique de Kets de Vries.

Onze aptitudes incontournables du leader scolaire au 21e siècle

En ces temps où les rôles des enseignants, des élèves et des parents sont en constante mutation, il va de soi que ceux de la direction évoluent conséquemment. Voici d’importantes aptitudes à développer et entretenir chez un cadre scolaire de nos jours :

    1. Il sait gérer la complexité et encourager les pratiques axées sur la différenciation pédagogique et toutes les formes de diversité;
    1. Devant cette complexité, il est à la fois tenace et résilient;
    1. Il est tolérant à l’ambiguïté en comprenant que l’éducation est en fait une mosaïque de nuances;
    1. Non seulement fait-il preuve de créativité pour aborder les problématiques complexes, mais en plus, il fait preuve de co-créativité pour les aborder avec les membres de son équipe;
    1. Il collabore avec tous les acteurs du milieu scolaire, allant des enseignants aux parents, en passant par la communauté et, bien évidemment, les élèves. Il sait aussi implanter les conditions gagnantes pour favoriser cette collaboration entre ces acteurs;
    1. Il déploie une vision systémique de sa profession. Il a une vision à grande échelle, car il sait pertinemment que tout est interrelié et que les forces qui font bouger l’école au quotidien n’existent pas séparément;
    1. Il exerce une pratique réflexive qui vise à éclairer le cadre sur les meilleures pratiques issues de l’expérience ou des données probantes;
    1. Il est engagé dans une démarche de formation continue et de développement professionnel;
    1. Il est impliqué dans des communautés d’apprentissage qui forment un réseau en soutien;
    1. Il sait faire usage de diplomatie et d’entregent, avec une capacité à dédramatiser diverses situations qui sont, la plupart du temps, gonflées d’émotion. Il doit également savoir dire « oui » et avoir le courage de dire « non » face à un entourage qui en demande toujours plus;
  1. Il possède et développe sa mentalité de croissance qui est, non seulement une flamme pour guider sa propre pratique, mais pour encadrer celle des autres, à commencer par celle des élèves.

Évidemment, la liste pourrait être étoffée. Cependant, voilà un bon début non seulement pour gérer une école au 21e siècle, mais pour bien inspirer les acteurs du monde scolaire à exercer leur propre profession ou leur propre rôle de façon à inspirer les élèves à leur tour.

Références

    • Fuda, P. (2016). Leadership transformed : how ordinary managers become extraordinary leaders. Las Vegas, Amazon Publishing.
  • Senge, P. (2016). La cinquième discipline : l’innovation collective dans les organisations apprenantes. Paris: Eyrolles.

Le leadership transformationnel

Il a déjà été écrit que le leadership est un phénomène complexe, difficile à saisir, à définir. Il s’exprime dans l’action où il laisse une certaine expertise transcender les comportements et attitudes dans des situations complexes susceptibles d’apporter un gain en crédibilité. Ces comportements et attitudes sont façonnés par l’expérience, d’une part, mais aussi par la mentalité de croissance (tel que vu dans le 2e chapitre). Bref, le leader est un apprenant perpétuel et il tire profit des situations complexes dans lequel il est immergé, parfois bien malgré lui, pour en faire des expériences qui marquent son leadership.

Le leadership n’a rien de fixe. Ce n’est pas un « tu l’as ou tu ne l’as pas »; c’est un acquis et cela se façonne à travers l’expérience. Le bon leader fait germer de nouvelles attitudes chez les autres pour qu’ils bâtissent leur propre expérience à leur tour. C’est en ce sens qu’on parle de leadership transformationnel. Le leader se transforme, certes, mais il transforme aussi les autres et l’institution dans laquelle il évolue. Son action en éducation est fondée sur l’importance de permettre aux autres acteurs d’exercer leur propre leadership et à le mettre au service de l’école. Inspiré par Leithwood (1994, 2000), cité par Stewart (2006), voici sept dimensions du leadership transformationnel en éducation :

  1. Bâtir une vision institutionnelle et établir des objectifs à rencontrer pour les leaders permet de susciter l’adhésion et de circonscrire les attentes. Cette vision est partagée avec l’équipe qui sera à pied d’oeuvre pour lui donner une forme.
  2. Favoriser la stimulation intellectuelle encourage une démarche de développement professionnel et permet, en un certain sens, de contribuer à ce que les collègues bénéficient tous de ladite stimulation.
  3. Offrir un support individuel permet de rejoindre personnellement chacun afin de reconnaître leur individualité et leur apport à la mission institutionnelle.
  4. Incarner les valeurs institutionnelles et organisationnelles implique que « les babines et les bottines » des leaders se suivent.
  5. Préciser les attentes élevées des pratiques professionnelles encourage chacun à se dépasser et évoluer dans sa pratique, une année scolaire après l’autre.
  6. Créer et alimenter une culture d’innovation dans l’école en soutenant ceux qui innovent et ceux qui souhaitent le faire grâce à diverses ressources matérielles, organisationnelles, humaines et financières.
  7.  Développer des structures de consultation dans le milieu afin de valoriser l’apport de chacun et implanter une culture de transparence.

Ces dimensions permettent de mettre l’accent sur un leadership qui génère l’innovation et l’adhésion collective à un idéal qui revêt la forme, du moins dans le monde scolaire, du projet éducatif de l’école.

Le leadership transformationnel revêt une forme altruiste puisqu’il incite le personnel à voir au-delà de leur propre intérêt pour envisager celui d’autrui. On parle donc de se transformer soi-même pour aspirer à transformer son école pour, ultimement, éduquer les jeunes qui la fréquentent. Au-delà de l’altruisme, les considérations individuelles sont également satisfaites puisque par la puissance de la contribution de l’individu à la cause collective, les gains sont palpables pour ce dernier : développement professionnel, bonification de l’expertise, satisfaction au travail, reconnaissance, autonomie et latitude professionnelle, soutien professionnel, etc.

Tout cela met l’accent sur la vision qui doit être établie dans le milieu scolaire et qui peut, par moment, faire défaut dans nos écoles. L’aspect relationnel est donc indissociable de ce type de leadership. La confiance envers son leader est incontournable et il est observé que son charisme est souvent souligné à grands traits.

Il s’agit donc de se laisser pousser par l’implication de ses collègues au lieu de s’évertuer à tenter constamment de les tirer vers le haut. C’est une question de mobilisation et de partage du leadership qui est au centre de l’approche transformationnelle.

Références

    • Fuda, P. (2016). Leadership transformed : how ordinary managers become extraordinary leaders. Las Vegas, Amazon Publishing.
  • Stewart, J. (2006). Transformational leadership : An evolving conception examined through the works of Burns, Bass, Avolio and Leithwood. Canadian journal of educational administration and policy, (54), 1-29.

La conclusion

Plusieurs estiment que pour que l’école québécoise poursuive son évolution en ce 21e siècle, il faut que les enseignants s’investissent dans leur développement professionnel et leur formation continue. Ce n’est pas faux, mais pour ce faire, ils ont besoin de soutien. Et ceux qui doivent leur offrir ce soutien sont inévitablement leurs directions d’école. Un lien étroit de collaboration est indispensable.

Il est souvent question de l’effet enseignant, comme quoi ce dernier a un effet direct sur la réussite scolaire de ses élèves. L’effet que la direction a sur les élèves est moins bien répertorié et les études se contredisent à cet égard. Cependant, il y a un effet indirect de la direction sur la réussite des élèves :

    1. La direction peut agir sur le cadre organisationnel et devenir un facilitateur pour, justement, transformer ce cadre et le placer au service de la relation pédagogique au lieu d’en faire un obstacle comme c’est souvent le cas. Ne l’oublions pas : le cadre, la structure organisationnelle influence les comportements.
    1. La direction doit agir comme partenaire pédagogique de l’enseignant en lui offrant diverses occasions qui doivent être saisies et réinvesties en occasions à saisir par les élèves.
  1. La direction doit être un modèle de développement professionnel, de formation continue et de développement d’une mentalité de croissance.

Son titre le dit : la direction doit donner… une direction. C’est un agent mobilisateur, un leader inspirant. C’est donc plus qu’un administrateur. C’est une étincelle qui allume d’autres étincelles. C’est un pyromane pédagogique; il allume des flammes, les regarde brûler et surtout, il les alimente parfois envers et contre tous!

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Marc-André Girard
Marc-André Girard est détenteur d’un baccalauréat en enseignement des sciences humaines (1999), d’une maitrise en didactique de l’histoire (2003), d’une maitrise en gestion de l’éducation (2013) et d’un doctorat en éducation (2022). Il s’est spécialisé en gestion du changement en milieu scolaire ainsi qu’en leadership pédagogique. Il s’intéresse également aux compétences du 21e siècle à développer en éducation. Il occupe un poste de direction dans une école publique et donne des conférences sur le leadership en éducation, les approches pédagonumériques, le changement en milieu scolaire ainsi que sur la professionnalisation de l’enseignement. Il a participé à des expéditions pédagogiques en France, en Finlande, en Suède, au Danemark et au Maroc. En septembre 2014, il a publié le livre « Le changement en milieu scolaire québécois » aux Éditions Reynald Goulet et, en 2019, il a publié une trilogie portant sur l'école du 21e siècle chez le même éditeur. Il collabore fréquemment à L’École branchée sur les questions relatives à l’éducation. Il est très impliqué dans tout ce qui entoure le développement professionnel des enseignants et des directions d'école ainsi que l’intégration des TIC à l’éducation. En mars 2016, il a reçu un prix CHAPO de l’AQUOPS pour l’ensemble de son implication. Il est récipiendaire de la bourse Régent-Fortin 2022 octroyée par l’ADERAE pour la contribution importante de ses études doctorales au développement de la pratique et des savoirs en administration de l’éducation.